Le Prix Tartuffe 2006 a été attribué à l’écrivain Christian Salmon pour son livre Verbicide (Climats, 2005) et son action en faveur de la liberté d’expression.
Christian Salmon est le fondateur du Parlement international des écrivains (1994-2003), du réseau des villes-refuges, de la revue Autodafé.

12 janvier 2006 : Une affiche de film interdite en Grande-Bretagne.
L’autorité britannique de régulation de la publicité a interdit l’affiche du fim biographique “Get rich or Die tryin” sur laquelle on peut voir le rappeur “50 Cent” Jackson, portant un bébé tout en étant armé d’un pistolet. (AFP)

26 janvier 2006 : Google s’autocensure pour avoir accès au marché chinois.
Après Yahoo et Microsoft, Google accepte, pour pouvoir opérer en Chine, la censure du gouvernement chinois. Son nouveau moteur de recherches, google.cn, expurge ou filtre tous les sites comportant des termes déplaisant au Parti au pouvoir (“démocratie”,”Falungong”, “dalaï-lama”, “indépendance de Taïwan”, etc). Quelques jours auparavant, Google avait refusé de livrer des renseignements sur les recherches des internautes demandés par l’administration fédérale américaine dans le cadre de la protection des enfants et de la lutte contre la pornographie en ligne. (Libération, 26 janvier 2006)

13 février 2006 : Tu ne représenteras pas Mahomet.
17 ans après l’affaire Salman Rushdie, des caricatures de Mahomet dans la presse européenne embrasent le monde musulman. (Libération, Le Monde 3 février 2006, Charlie Hebdo numéro spécial du 9 février 2006)

16 février 2006 : La Demeure du Chaos condamnée à être remise en état.
Le tribunal correctionnel de Lyon a condamné Thierry Ehrmann, le propriétaire de cette maison bourgeoise de Saint-Romain-au-Mont-d'Or (Rhône) transformée en oeuvre d'art, à remettre son bien en état. Depuis quatre ans, cet homme d'affaires iconoclaste, patron de l'entreprise Art Price, leader mondial de la cotation en ligne d'oeuvres d'art, a entrepris de « déconstruire » son ancien relais de diligence du XVIIe siècle pour en faire une « oeuvre d'art monumentale collective » déclinant de multiples interventions sur le thème du chaos. Une cinquantaine d'artistes participe à cette démarche . (Le Monde, 21 février 2006)
www.demeureduchaos.org

21 février 2006 : Interdiction à Lublin (Pologne) d’une exposition en faveur de la liberté d’expression.
Une université polonaise a interdit une exposition en faveur de la liberté d’expression, où étaient montrés des maillots avec des slogans comme "Je n’ai pas pleuré après la mort du pape". "L’exposition et les textes imprimés sur les tee-shirts risquaient d’offenser les sentiments et les convictions de nombre de gens", a justifié Wieslaw Kaminski, président de l’université UMCS de Lublin (sud-est), cité par le quotidien Rzeczpospolita. L’exposition présentait des personnalités de la vie publique polonaise vêtues de maillots portant des inscriptions touchant aux principaux tabous de la société polonaise.
"Je suis gay", "Je suis malade du SIDA", "Je suis juif", "Je suis arabe", "Je me masturbe", "J’ai mes règles", pouvait-on lire sur les maillots. "Il faut avoir perdu tout sentiment humain pour inscrire sur un tee-shirt +Je suis malade du SIDA+ ou +J’ai avorté+", a estimé l’évêque de Lublin, Mgr Jozef Zycinski. La Fédération Internationale Helsinki pour les Droits de l’Homme, a décidé d’annuler un festival de films que l’exposition de tee-shirts devait accompagner. "L’exposition avait pour objectif de tenter d’ouvrir un débat sur la liberté d’expression en Pologne. La décision du président de l’université doit
être considérée comme une forme inacceptable d’ingérence", a déclaré le président du comité polonais Helsinki, Marek Antoni Nowicki. Source AFP.

jeudi 2 mars 2006 : Attentat manqué au théâtre Alfil ( Madrid) contre le spectacle de Léo Bassi.
Le personnel d’un théâtre de Madrid a neutralisé mercredi soir un engin de fabrication artisanale près de la loge de l’acteur Léo Bassi qui y joue chaque soir une pièce tournant en dérision l’Eglise catholique au nom des valeurs laïques. Un responsable du théâtre Alfil a pu éteindre une mèche préparée pour la mise à feu de la bombe alors que près de 200 personnes se trouvaient à l’intérieur de la salle. Peu avant, il avait vu un homme d’une cinquantaine d’années qui abandonnait rapidement le local. Léo Bassi, qui a présenté cette pièce intitulée "La Révélation" dans plusieurs villes européennes, s’est élevé contre "cette attaque à la liberté" qui aurait pu provoquer "la mort de nombreuses personnes" si l’engin avait explosé. Dans des déclarations à la presse, l’acteur a assuré qu’il n’allait pas suspendre son spectacle et a attribué les réactions contre sa pièce à "une maladie espagnole", arguant qu’aucun incident ne s’était produit durant sa représentation dans le reste de l’Europe. L’acteur a affirmé avoir été menacé à maintes reprises et a indiqué que plusieurs cocktails molotov avaient été lancés il y a dix jours contre le théatre où il se produit à Madrid. Environ 150 catholiques traditionalistes espagnols avaient manifesté vendredi dernier devant le théâtre Alfil à l’appel de Alternativa Espanola (AES, Alternative espagnole), un parti catholique défendant "la vie, la famille, les racines chrétiennes et l’unité de l’Espagne". En
pleine affaire des caricatures de Mahomet, l’acteur se déguise chaque soir en pape Benoît XVI ou en prédicateur évangélique, promet de distribuer des préservatifs aux Africains et ridiculise les invraisemblances de la Genèse ou demande pardon pour l’attitude de l’Eglise sous le Franquisme. Source AFP.

Mars 2006 : Directive européenne obligeant les États à conserver jusqu’à deux ans certaines informations sur les communications téléphoniques et Internet dans leur pays (nom de l’appellant, origine de l’échange, courriel de l’envoyeur...)

1 er avril 2006 : Une page non écrite ne pourra jamais être déterrée.
“(...)On médit volontiers de la censure et l’on a raison, mais il y a un mal plus pernicieux que la censure, c’est l’autocensure; c’est lorsque l’artiste, qu’il soit écrivain, peintre ou cinéaste, renonce par pusillanité consciente ou inconsciente à traiter tel thème, à peindre tel sujet, à filmer telle intrigue, parce qu’il sait que l’ordre moral régnant soit ne lui permettrait pas de soumettre son oeuvre au jugement du public, soit, si l’oeuvre était malgré tout rendue publique, se déchaînerait contre lui. Oui, l’autocensure est pire que la censure, parce qu’elle est sans remède. Les scènes que votre éditeur ou que votre producteur vous demande de couper, les toiles que votre galeriste vous conseille de ne pas exposer, c’est désagréable mais ce n’est pas grave: vous les mettez en sûreté, sachant que tôt ou tard, de votre vivant ou après votre mort, elles verront le jour. Il n’en va pas de même quand vous renoncez à exprimer ce que vous avez dans le coeur parce que cela serait trop contraire au politiquement correct, au sexuellement correct, voire par ces temps d’excitation confessionnelle, au religieusement correct. Soljénitzine a écrit L’Archipel du Goulag, puis pour échapper au KGB, il en a enterré le manuscrit dans un jardin, mais des années plus tard, un beau jour, il l’a déterré. Une page non écrite ne pourra, elle, jamais être déterrée.” Gabriel Matzneff , in L’Avant-scène, n° 1201, avril 2006

8 avril : Cinq chansons censurées pour le premier concert en Chine des Rolling Stones.
“Heureusement , nous avons quatre cents autres chansons que nous pouvons jouer, alors ce n’est finalement pas vraiment un problème” déclare Mick Jagger (8 avril, La Voix du Nord)

Avril 2006 : Publication en français de “Cleopatra ’s Club”, pièce de théâtre de Paul Schrader.
Scénariste de "Taxi Driver" et de "La Dernière Tentation du Christ", Schrader situe l’action de sa pièce en Égypte, lors du Festival de cinéma du Caire. Deux Américains, un cinéaste-producteur de film et un critique, invités pour participer au jury ont la mauvaise idée de vouloir signer une pétition en faveur d’un film censuré : The edge of love, réalisé en arabe par un Égyptien raconte l’histoire d’un Palestinien qui aime une juive à Londres. Ils vont faire l’objet d’une diabolique opération de manipulation. "L’objet du Festival du Film, ce n’est pas le cinéma mais la culture, or la culture c’est de la politique, et la politique c’est aussi la religion." (éditions Quatre vents/L’Avant-scène théâtre).

5 mai 2006 : Déprogrammation d’une pièce de Peter Handke à la Comédie-Française.
“(...) la censure est l’examen d’un texte ou d’un spectacle exigé par le pouvoir avant d’en autoriser la diffusion. Cet examen parfois se conclut par une interdiction.” Bruno Bayen, “Le Monde” 5 mai 2006, après le retrait de la pièce de Peter Handke “Voyage au pays sonore ou l’art de la question” dont il devait assurer la mise en scène à la Comédie-Française.

juillet 2006 : Relire Les nouveaux chiens de garde.
(...) “un journaliste dispose dorénavant d’à peine plus de pouvoir sur l’information qu’une caissière de supermarché sur la stratégie commerciale de son employeur (...) Page 16 - “ l’intérêt de l’actionnaire ne doit pas être remis en cause par un journal qu’il contrôle, même si cette censure opère au détriment du lecteur. ” Page 5 7. (Serge Halimi, Les nouveaux chiens de garde, Raisons d’agir, 2006)

13 septembre 2006 : Le propriétaire de la Demeure du Chaos est condamné à 200 000 euros d'amende mais échappe à la restitution en l'état.
Le propriétaire du domaine est condamné par la cour d'appel de Lyon à payer 200 000 euros d'amende, montant alourdi par rapport à la première instance. Le ministère public n'avait requis aucun montant, faisant valoir que l'argument financier n'était pas un obstacle pour Thierry Ehrmann, qui a bâti la 307e
fortune de France (selon le magazine Challenges) grâce au Minitel rose. C'est une demi-victoire pour le maire de Saint-Romain qui réclamait également, au nom du non-respect des règles d'urbanisme, la remise en état initial des parties visibles depuis la voie publique. Ce qu'avait requis l'avocat général, mais qui n'a pas été retenu par la cour d'appel contrairement au premier jugement. «La mise en conformité des lieux ou des ouvrages, ou leur démolition (...) sont facultatives», «les juges apprécient souverainement de les ordonner ou non», rappelle l'arrêt. La propriété est un chantier en permanente évolution où sont présentées 2 500 oeuvres. Régulièrement ouverte au public par son propriétaire, elle le sera aussi pour les journées du patrimoine. Une procédure de demande de classement de la propriété est en cours au ministère de la Culture. (AFP, 14 septembre 2006)

25 septembre 2006 : Déprogrammation à Berlin de l’opéra de Mozart Idoménée.
Invoquant “ la sécurité du public et des collaborateurs de l’opéra”, la direction du Deutsche Oper, l’une destrois scènes lyriques de Berlin, déprogramme l’opéra de Mozart, mis en scène par Hans Neuenfels (production 2003). Dans la scène finale, Idoménée, roi de Crète, brandissait les têtes décapitées de Poséidon, Jésus, Bouddha et Mahomet. (Libération, 29 septembre - Le Monde, 28 septembre et 6 octobre 2006)

27 septembre 2006 : La SNCF déboutée de ses poursuites contre des magazines de “graff”.
La Cour de Paris a débouté en appel la SNCF qui avait assigné des magazines du “mouvement graff” pour avoir reproduit des photographies de trains tagués. Dans son arrêt, la Cour souligne que ce sont les graffitis qui ont été reproduits à titre principal et non les wagons, “supports d’oeuvres éphémères”. Pour la Cour, la SNCF ne rapporte pas la preuve du trouble anormal qui résulterait de la publication des clichés litigieux, elle ne démontre pas non plus “que les revues qui ont publié les photographies incriminées contribuent de façon certaine à l’augmentation du nombre de tags sur ses trains”. L’arrêt rappelle enfin que le mouvement graf “est reconnu à la fois comme un phénomène de société et comme un mode d’expression artistique.” (AFP et maquis-art)

5 octobre 2006 : Censure - autocensure en Chine
“La première censure est effectivement celle qu’on s’applique à soi-même. En Chine, c’est même devenu un système. Il faut savoir qu’il n’ya pas, en fait de censure préalable dans la plupart des cas, mais que la force du système est de transformer tout le monde en flic.”(...) “Il y a quelques mois, j’ai lu qu’un metteur en scène de théâtre chinois avait monté “La ferme des animaux” d’Orwell dans un théâtre de Pékin. Les autorités lui ont demandé de changer des noms, certaines répliques etc. Le résultat est que personne n’est venu les voir, sachant qu’ils allaient assister à une pièce dénaturée, détournée de son sens premier.” Cinq ans en Chine de Pierre Haski (Le Nouvel Observateur, 5 octobre 2006)

6 octobre 2006 : Décrochage à Londres de dessins de Hans Bellmer.
La Whitechapel Art Gallery décroche une dizaine de dessins de Hans Bellmer, figure majeure du surréalisme, au motif que certaines oeuvres érotiques pouvaient choquer la population musulmane du quartier. (Le Monde, 6 octobre 2006)

7 octobre 2006 : Assassinat à Moscou de la journaliste russe Anna Politkovskaya
Le jour où était inauguré à Bayeux le Mémorial des journalistes, était assassinée, à Moscou, Anna Politkovskaya, correspondante du journal indépendant “Novaya Gazeta”. Elle avait été menacée à plusieurs reprises à la suite de ses publications sur les violations des droits de la personne commises par l’armée russe en Tchétchénie et au Caucase du Nord ou à la suite de son travail d’enquête sur la prise d’otages au théâtre de Moscou, en octobre 2002. En février 2001, elle avait été détenue pendant trois jours par des soldats russes dans le village de Khatuni (Tchétchénie), où elle avait été menacée de viol et de mort. En 2004, elle avait été empoisonnée dans l’avion, alors qu’elle se rendait en Ossétie pour participer aux négociations avec les preneurs d’otages de l’école de Beslan.
Son assassinat intervient alors que devait paraître, le 8 octobre 2006, dans Novaya Gazeta, son article sur la pratique de la torture en Tchétchénie, impliquant directement Ramzan Kadyrov, premier ministre de Tchétchénie, nommé par le Président Poutine.
Depuis quinze ans, la Russie arrive au troisième rang des pays les plus meurtriers du monde pour les journalistes, après l’Irak et l'Algérie.
Anna Politkovskaya était l’auteur de plusieurs livres sur la guerre en Tchétchénie : Voyage en enfer, Robert Laffont, 2000; Tchétchénie, le déshonneur russe, Buchet Chastel, 2003; La Russie selon Poutine, Buchet Chastel, 2005.

9 octobre 2006 : autocensure à Laval
Alors qu'il avait fini de réaliser trois fresques géantes ( Oui & non, Point d'interrogation et Hommage au cygne égal...) commandées par la ville de Laval et l'État dans le cadre de la rénovation du Palais de justice de Laval,
l'artiste d'origine haïtienne Hervé Télémaque a dû, quelques jours avant l'inauguration, "ombrer", pour qu'il ne soit plus reconnaissable, le visage de Nicolas Sarkosy, présent sur une des fresques installées dans la salle d'audiences. Uburlesque.(Ouest-France, 9 octobre / Canard Enchaîné, 4 -11 octobre 2006)

Voir: Hervé Télémaque Et si c’était ainsi n°II, (Âne et Sarko/Plantu), 2003, acrylique sur toile , 130 x 130 cm
www.louiscarre.fr/artistes/herve-telemaque

Pour mémoire:

Novembre 2005, suite à un entretien avec le ministre au ministère de l’intérieur, un éditeur renonce à publier la biographie de sa femme Cécilia Sarkosy.
19 décembre 2005, le 9ème collectif des sans-papiers et Act Up-Paris lançaient l’affiche « Votez Le Pen », avec un portrait de Nicolas Sarkozy pour dénoncer la guerre menée aux étrangers et la dérive du ministre de l’Intérieur vers un discours et une politique d’extrême droite toujours plus affirmée. Une affiche largement collée dans les rues de Paris et disponible en téléchargement sur le site Web d’Act Up-Paris.
Le 21 décembre 2005, Act Up-Paris enlève le visuel de cette affiche de son site Web.
Décembre 2005, la chanson “Tous les tizenfants” du groupe Polemix/La Voix Off reprenant parodiquement des propos de N Sarkosy est retirée de la compilation “CQFD” éditée par le magazine Les Inrockuptibles.
Consulter http://www.citoyenlambda.net/accueil/accueil.php et le site Zalea Tv

12 octobre 2006 : Le romancier turc Orhan Pamuk, prix Nobel de littérature
Orhan Pamuk fut le premier écrivain dans le monde musulman à condamner ouvertement la fatwa contre Salman Rushdie. En 2005, il avait fait l’objet de menaces contre sa vie pour avoir admis dans un entretien accordé à un journal suisse, qu'entre 1915 et 1917, « un million d'Arméniens et 30 000 Kurdes ont été tués sur ces terres ». Ces déclarations avaient provoqué de vives réactions dans l'opinion publique turque et avaient été jugées contraires à l'intérêt national. Le sous-préfet de Sütçüler, région d’Isparta, avait ordonné la destruction de tous les livres de l'écrivain. Rien ne semble avoir été détruit...faute d’ouvrages présents dans les librairies et les bibliothèques de la région ; une chaîne de télévision locale lança même un appel pour retrouver une jeune étudiante qui avait déclaré avoir en sa possession un livre d’Orhan Pamuk. En octobre 2005, il avait été mis en examen pour insulte délibérée à l'identité turque. Il aurait dû comparaître en justice le 16 décembre 2005 pour "insulte délibérée à l'identité turque" en raison de propos tenus sur le génocide arménien. Il risquait quatre ans de prison (Le Monde du 30 septembre 2005). Lors d'une conférence de presse, qui a montré qu'il bénéficiait du franc soutien du monde des lettres, Orhan Pamuk avait plaidé pour la liberté d'opinion et pour le respect des droits de l'homme en Turquie. Il avait également « souhaité de tout coeur que la Turquie fasse partie de l'Union européenne ». Notamment en raison de la médiatisation internationale, le procés fut reporté, puis les accusations furent finalement rétirées le 22 janvier 2006. (Wikipedia).

19 octobre 2006: Police des bibliothèques aux USA
Des agents du FBI, par une “lettre de sécurité nationale”, somment des bibliothécaires de leur livrer l’identité des lecteurs et la liste de leurs lectures. Les lettres de sécurité nationale ont été créées en 1986.
Depuis le Patriot Act, elles peuvent être produites par un bureau local du FBI sans la permission d’un juge. Elles ne se limitent pas aux bibliothèques. Il suffit que l’information recherchée soit “en rapport” avec une enquête sur le terrorisme international ou l’espionnage d’un pays étranger. “Celui qui échange la liberté contre la sécurité ne mérite ni l’une ni l’autre et perdra les deux” Thomas Jefferson. (Le Nouvel Observateur, 19 octobre 2006).

20 octobre 2006 : Le tribunal correctionnel de Paris déboute Génération mémoire harkis de la plainte en diffamation contre Messaoud Benyoucef (auteur de la pièce de théâtre Au nom du père), Claude-Alice Peyrottes ( metteuse en scène du spectacle) les éditions l’Embarcadère, (maison éditrice du texte). L’association Génération mémoire harkis avait essayé d’interdire les représentations du spectacle à sa création en mars 2005 à Fécamp puis en juin à Paris au Théâtre de l’Épée de bois.

23 octobre 2006 : Un livre pour enfants Momo Palestine, est retiré des rayons de la bibliothèque de Vence
Pierre Marchou, maire UMP de Vence (Alpes-Maritimes) a ordonné le retrait des rayons de la bibliothèque municipale du livre "Momo Palestine" de Robert Gaillot, qualifiant cet album jeunesse " de tract antisémite déguisé qui menace la paix sociale". Publié en 2002 par les éditions Grandir (Nîmes), "Momo Palestine", livre bilingue en arabe et francais pour les sept-douze ans, raconte l'Intifida vue par un enfant palestinien. Cf Nice-Matin / L'Humanité et l'article de Jean-Pierre Trusseau "La représentation du conflit israélo- palestinien dans la littérature pour la jeunesse"
*(Nuit blanche, n°103, juin 2006)

6 novembre 2006 : Contrôle - autocontrôle
4,2 millionsde caméras de surveillance en activité au Royaume-Uni, une caméra pour 14 habitants. “Dans le village de Middlesbtough, des caméras parlantes viennent d’être installées et interpellent à distance les auteurs d’infractions même bénignes. Nous nous dirigeons vers une société de contrôle donc, mais aussi d’autocontrôle: le quadrillage de la société, l’installation générale des caméras poussent les personnes à se réfréner. Cela peut, à terme, affecter tout simplement les facultés créatives de notre société.” Thierry Balzacq (Le Monde, 6 novembre 2006)

6 novembre 2006 : Lobbying contre un film
À l’approche des fêtes de fin d’année, la profession des diamantaires s’inquiète de l’influence négative possible sur la vente des bijoux, de “Diamant de sang”, film d’aventures qui dénonce les tueries provoquées en Sierra Léone (1997-2000) par la convoitise des pierres précieuses. La De Beer, géant sud africain des gemmes, a offert huit millions de dollars au lobby du diamant pout faire campagne contre ce film. (Le Monde, 6 novembre 2006)

8 novembre 2006 : Une page de journal arrachée
À la demande des autortés égyptiennes, la page 5/6 du Canard Enchaîné a été arrachée au passage de la frontière: aucune révélation fracassante sur cette page, mais la reproduction de photos de pin-up très déshabillées publiées dans France-Soir. Pour mémoire, en 1985, le livre Les Mille et Une Nuits avait été condamné pour atteinte à la pudeur et corruption des moeurs des jeunes. Trois mille exemplaires avaient été saisis et détruits; l’éditeur et l’imprimeur avaient été envoyés en prison.

9-10 novembre 2006 : Visages de la censure, de la genèse à la reception... où se cache-t-elle?
Colloque organisé à Toulouse par le Centre régional des lettres Midi-Pyrénées.
www.crl.midipyrenees.fr

9 novembre 2006 : Esthétiques de l’extrême, retour du balancier
"Révolution de l’impudeur, exaltation de la violence et de la pire brutalité, exhibition du corps organique et excrémentiel, culture du cadavre aux fins d’une esthétique du dépassement généralisé... Il n’y a plus de limite, l’illimite s’érige dorénavant en non-frontière naturelle de l’esthétique.(...) La réponse à cet emballement est déjà là. D’un côté, la grosse machine consensualiste, prodigue de gentils spectacles, que représente l’industrie culturelle, qui s’imagine sauver l’authentique culture en dérivant le désir vers des formules cosmétiques. De l’autre, les stratégies du freinage : la censure ou l’autocensure, la demande d’un retour en force de l’ordre moral et de l’interdit. Panoplie hypnotique ou panoplie régressive, qui l’emportera contre l’esthétique extrême?” Paul Ardenne.
(Entretien dans Libération “Dégoûts et des couleurs”, 9 novembre 2006.)

10 novembre 2006 : L’Insoutenable Légèreté de l’être enfin édité en tchèque
L’Insoutenable Légèreté de l’être de Milan Kundera, 22 ans après sa parution en français (Gallimard, 1984) est publié pour la première fois dans sa langue d’origine par l’éditeur tchèque Atlantis.

20 novembre 2006 : Mise en examen de l'ancien directeur du musée de Bordeaux pour diffusion de messages violents à caractère pornographique accessibles à un mineur.
Six ans après l'exposition "Présumés innocents:l'art contemporain et l'enfance"qu'il avait organisé en tant que directeur au Centre d'art plastique contemporain de Bordeaux, Henry-Claude Cousseau, actuel directeur de l'École nationale supérieure des beaux-arts de Paris, est mis en examen pour avoir exposé des oeuvres à caractère violent, pornographique "portant atteinte à la dignité de l'enfant".

22 novembre 2006 : Saw 3, film américain d’épouvante gore interdit au moins de 18 ans
Renaud Donnedieu de Vabres a décidé de suivre l'avis de la commission Commission de classification des œuvres cinématographiques. Dans un communiqué, le ministre de la culture estime "que la violence et le sadisme incessant et insoutenable de scènes s'apparentant explicitement à des tortures physiques et morales justifient pleinement cette décision d'interdiction". Le syndicat français de la critique de cinéma avait protesté contre le fait que "pour la première fois depuis la promulgation du décret du 12 juillet 2001 réinstaurant l'interdiction aux moins de 18 ans (hors films X)", un film dépourvu de "scène de sexe explicite" soit "menacé d'une telle interdiction". La Société des Réalisateurs de Films (SRF) dénonce un "retour en arrière regrettable, dans une société où la maturité dans le domaine de la culture de l'image est communément reconnue aux adolescents". La Fédération nationale des distributeurs de films et le Syndicat français de la critique de cinéma déclarent craindre une "hausse générale du niveau de la censure". Pour beaucoup d’internautes, cette mesure va "encourager les téléchargements illégaux". D'autres font remarquer qu'il sera aussi simple de se procurer la version DVD.

29 novembre 2006 : Arte diffuse le film “Quand la CIA infiltait la culture” de Hans-Rüdiger Minow
Dans le cadre du Plan Marshall, les USA financèrent en Europe de 1950 à 1967, une statégie d’influence, visant à soustraire intellectuels, artistes, à l’influence soviétique et à décrédibiliser, ridiculiser ceux qui ne lui étaient pas favorables. Créé dans ce but, le Congrès pour la liberté de la culture, financé par des fondations (Ford, Farfield) et piloté par la CIA, soutint des mouvements culturels (peinture expressionniste abstraite, musique atonale), des revues (Preuves), des écrivains, des journalistes favorables à l’économie de marché et aux libertés individuelles.

30 novembre 2006 : Une nuit à la bibliothèque... de Téhéran
Du 29 octobre au 3 novembre, Une nuit à la bibliothèque, pièce de Jean-Christophe Bailly (Christian Bourgois, 2005), mise en scène par Gilberte Tsaï, a été jouée à guichets fermés, par trois comédiens et une comédienne iraniens, devant 85 personnes, dans la Bibliothèque nationale d’Iran. L’auteur avait dû modifier la réplique (p 37): “C’était Lui, l’envoyé, peut être. Silencieux, car un
prophète, je l’aurais tué de mes mains...” Cf “Les jeux de l’art et de la censure”, Odile Quirot, Le Nouvel Observateur, 30 novembre 2006.

4 décembre 2006 : De la culture en Amérique
“...Le système culturel à but non lucratif américain, défini au XIXème siècle pour éviter l‘emprise de l’État et du marché sur les arts et pour donner aux citoyens un pouvoir indépendant sur la culture, se révèle, dans la pratique, un système qui redonne ce pouvoir, non pas seulement aux milieux aisés, mais au 1% des Américains les plus riches. Et quand l’art est placé entre les mains d’une élite financière ultra-privilégiée, il y a un risque pour que l’expérience artistique ne devienne rien d’autre qu’un simple moyen de distinction et un rituel de délivrance de culpabilité.” (p 342) “Si l’État peut censurer Mapplethorpe, les riches donateurs peuvent aussi censurer implicitement toute une partie des oeuvres disponibles en vertu de leur haine de l’avant-garde ou de leur peur de la controverse” (p549) Frédéric Martel De la culture en Amérique, Gallimard, 2006.

11 décembre 2006 : Arrestation de Jean-Paul Sartre pour délit d’opinion, archives
Le 26 juin 1970, l’écrivain Simone de Beauvoir et le philosophe Jean-Paul Sartre sont arrêtés pour délit d’opinion, alors qu’ils vendent à la criée le journal “La cause du peuple” près du métro Bonne nouvelle.
Images en ligne sur le site de l’INA : www.ina.fr > Rechercher > Arrestation de Jean-Paul Sartre.

12 décembre 2006 : Publication de Censure et caricatures ( Images interdites et de combat de l’histoire de la presse en France et dans le monde) de Jean-Michel Renault (Pat à Pan /Reporters sans frontières, 2006).

16 décembre 2006 : Demande de censure
“Entretenir dans le public un sujet polémique est un moyen classique de doper l’audimat. La polémique, de manière invariable, suscite la curiosité, et cette dernière, en cascade la consommation. L’irrévérence calculée, pour grossières qu’en soient les ficelles, est un ressort ordinaire de l’esthétique extrémiste. De
manière récurrente, ce vecteur spécifique est utilisé par les producteurs culturels chaque fois que l’appétit des masses s’affaisse, voire en amont de façon préventive, pour éviter qu’il ne s’affaisse. Les médias culturels sont pleins de ces faux scandales à durée limitée, de ces effets d’annonce extraordinaires élaborés selon un mode d’appel qui est celui de la publicité...De cette mécanique d’agitation concertée, la polémique suscitée par la parution, lors de la rentrée littéraire 2002, des romans Rose bonbon de Nicolas-Jones Gorlin ou Il entrerait dans la légende de Louis Skorecki, fournit un exemple d’école...” Paul Ardenne : Extrême, esthétiques de la limite dépassée, p127 à 130, Flammarion, 2006.

18 décembre 2006 : Outrages aux bonnes moeurs, bon anniversaire Monsieur Pauvert
Il y a cinquante ans, Jean-Jacques Pauvert comparaissait devant le tribunal correctionnel de Paris pour outrages aux bonnes moeurs et à la morale publique. Il lui était reproché d’avoir édité quatre livres du marquis de Sade : La Philosophie dans le boudoir, Les Cent Vingt journées de Sodome, La Nouvelle Justine ou Les Malheurs de la vertu, Histoire de Juliette ou Les Prospérités du vice. Pour sa défense, il avait déclaré : “le rôle de l’éditeur est de donner aux intellectuels les textes dont ils ont besoin”. (Le Monde).

29 décembre 2006 : La Scala déprogramme le "Candide" de Bernstein mis en scène par Robert Carsen
Stéphane Lissner, superintendant et directeur artistique de la Scala de Milan, a annoncé qu’il retirait de la saison 2006-2007 le “Candide” de Bernstein-Voltaire, estimant que la mise en scène n'était pas en ligne avec sa programmation artistique. Selon la Scala, coproductrice du spectacle, la scène où des acteurs portant des masques de Berlusconi, Bush, Blair, Poutine et Chirac dansent, ivres, sur des matelas flottant sur une mer noire de pétrole, ne serait pas à l’origine de la déprogrammation. (Source AFP)
“Candide” sera diffusé sur Arte le 20 janvier 2007, à 22h30, et sur France Musique le 7 février, à 20h.