ORPHÉON - BIBLIOTHÈQUE DE THÉÂTRE ARMAND GATTI
NOUVELLES ACQUISITIONS
 
 

 

 

 

 

 

 

HARTLEY Matt        Brûler des voitures, traduit de l’anglais par Séverine Magois, Théâtrales, 2013
Le récit, en trois actes, se déroule en temps réel au cours d’une même nuit, entre 3h30 et 5h du matin, dans trois appartements de trois quartiers de Londres. Il s’agit en fait de trois pièces, assez courtes, qui pourraient être jouées séparément, même si des liens les relient. Dans les trois cas, des gens qui ne dorment pas, toujours debout, éveillés, en proie à la souffrance et qui finiront par trouver l’apaisement : un homme et sa femme culpabilisés par la perte accidentelle de leur enfant (une erreur d' inattention), ont enfermé dans la chambre de leur fille morte une adolescente noire, placée chez eux par les services sociaux; une bande de jeunes fêtards de la classe moyenne, ayant abusé de la cocaïne et écrasé avec leur voiture un jeune noir, envisagent diverses hypothèses pour dissimuler l’accident et leur délit de fuite qui pourraient mettre en péril leurs carrières professionnelles prometteuses; une jeune femme, battue par son compagnon plus âgée, s’apprête à le quitter quand elle découvre qu’il secourt un jeune noir en train de mourir dans la rue sous la fenêtre de leur maison. Le titre “Brûler des voitures” ne reflète que partiellement la pièce, attirant l’attention sur la deuxième séquence et le comportement raciste de jeunes blancs, convaincus de leur supériorité, prêts à tout pour réussir.

DAMESTOY Marina        A.M.O. (Antigone, Médée, Ophélie), Les Xérographes, 2013
Fille d’un militant politique algérien exilé en France en 1979, Safia, 31 ans, est devenue une journaliste reporter d’images célèbre pour son traitement des sujets sociaux comme les discriminations. Pour sa chaîne de télévision, elle couvre en direct l’ incendie d’un centre de rétention provoqué par des sans-papiers. À l’extérieur, une manifestation tourne à l’échaufourrée, faisant deux victimes: Jamel Khaled, chef de file des manifestants, responsable du collectif Utopia et Ahmed Khaled, son frère, préfet de police. Suite au drame, le président de la République française annonce la dissolution de neuf associations de soutien aux sans-papiers, le doublement des quotas d’expulsion, l’interdiction de manifester en faveur des étrangers et de leur prodiguer de l’aide. Au risque d’aller en prison, Safia passe outre, mettant en péril sa carrière professionnelle et sa relation avec l’homme qu’elle aime. Sur internet, elle lance un appel à la désobéissance civile. Cette fiction politique, revisitant la figure d’Antigone, est le premier volet d’un triptyque où sont convoquées Médée et Eurydice.

MASSINI Stefano        Chapitres de la chute. Saga des Lehman Brothers, traduit de l’italien par Pietro Pizzuti, L’Arche, 2013. - 290p.
Le 11 septembre 1844 débarquait à New York, un jeune juif bavarois, Henry Lehman. Ayant ouvert à Montgomery, dans l’Alabama, un petit magasin de tissus et de confection, il est bientôt rejoint par ses deux frères Emanuel et Mayer. Tous trois commencent à s’enrichir en vendant des vêtements en coton puis les graines pour planter le coton, les outils pour le travailler, les chariots pour le transporter. Suite à un incendie des plantations, ils passent à un autre niveau : acheter et vendre le coton brut expédié dans le Nord. La guerre de Sécession ne les ruinent pas grâce à leur succursale de New York où ils vendent aussi du café, du charbon. Ayant obtenu de l’Alabama le statut de banque, ils s’installent définitivement à New York comme banquiers et se lancent dans le financement de la ligne de chemin de fer allant vers le Pacifique, dans la recherche pétrolière en Alaska, dans la construction du canal du Panama... Au début du XXème siècle, ils entrent en politique : Herbert Lehman devient gouverneur de New York, Irving juge suprême ; « New York devint une seule et grande Lehman ». Épargnée par Roosevelt lors du krack de 1929, la banque Lehman Brothers fera faillite le 15 septembre 2008, déclenchant aux Etats-Unis une crise économique, qui s’étendra à l’Europe, l’Afrique... Sur le traitement au théâtre du capitalisme financier, voir aussi quatre autres pièces récentes : D’un retournement l’autre de Frédéric Lordon (Seuil, 2011), Roman d’un trader de Jean-Louis Bauer (Actes Sud-Papiers, 2011), Madoff du collectif Libertalia (Le Cerisier, 2011) Le système Ponzi de David Lescot (Actes Sud-Papiers, 2012).

DEPAUW Lucie        Dancefloor Memories, Koïné, 2013
Verticalement sur la page, trois colonnes, pour trois voix, celles des trois protagonistes. À gauche, Gary, un Américain; au centre en italiques, le texte de Pierre Delormes; à droite, les répliques de Marguerite, femme de Pierre. Elle et lui ont eu quatre enfants, trois filles, un garçon, des petits-enfants ; leur mariage tient les années, bientôt ils fêteront en famille leurs noces de camélia. Mais depuis quelque temps, la santé de Pierre se dégrade, il perd la mémoire. Marguerite a fait appel à une aide à domicile, la créole Léonie qui, un jour, lui conseille d’aller se distraire, danser. C’est là, sur un parquet de danse, que Marguerite rencontre Gary, un octogénaire : début d’une histoire d’amour. 

BENFODIL Mustapha        Le point de vue de la mort, Al Dante, 2013
Long monologue en deux actes, dans un lieu unique : la morgue de l’hôpital d’un bled perdu du sud algérien, nommé BalBala (clin d’oeil à Balbala d’ Abdourahman A. Waberi ?), où Moussa, dit Malik El Mauwt, la quarantaine, est employé à temps plein comme thanatopracteur. C’est là qu’il travaille, à réceptionner les cadavres, les laver, les recoudre, qu’il mange, qu’il dort, en dépit d’une climatisation défaillante. Sur les conseils d’Aziz, un ami poète et blogueur, il enregistre sur un dictaphone tout ce qu’il fait et voit. Rédigeant oralement les fiches des cinquante morts qui arrivent chaque mois dans ses coffres frigorifiques déjà pleins à ras bord, il dresse peu à peu un tableau de l’Algérie aujourd’hui : “Pour faire le diagnostic des ténèbres? Pour faire l’autopsie de nos paradis perdus ? Pour apprendre l’art de l’embaumement des mensonges... Non l’esthétique de la décomposition n’est pas tellement mon fort. Je ne sais pas maquiller les massacres. » 

TOSTAIN Christophe        Expansion sous un ciel vide d’ardoises, Espaces 34, 2013 ” F. travaille depuis vingt ans comme caissière dans un centre commercial. F. aime ses collègues, son métier, elle respecte sa direction, elle est même la meilleure employée. À la maison, son mari, sans travail, reste seul. Ancien cadre du supermarché, il a été viré parce qu’il n’acceptait pas d’aller travailler à huit cents kilomètres de sa femme, et surtout à cause de son sens de l’éthique. « Votre éthique découle d’une vision archaïque du modèle productif. Aujourd’hui le monde nous impose d’être destructeur pour être créateur. Cessez de considérer l’humain comme un outil doté d’une pensée, de le protéger contre l’’accélération du temps, mais pensez-le comme un robot doué d’un force physique très endurante.” Avant d’être licencié du groupe, il a fait l’effort de concevoir la transformation du super en hypermarché. Cela entraîne pour les employé(e)s, dont F., une nouvelle organisation du travail: suppression du vestiaire, travail le jour de Noël, arrivée d’une nouvelle caisse allemande dotée d’une caméra et qui parle… 

CHEVROLET Gérard Quelquefois j’ai simplement envie d’être ici : Théâtrogammes,        Théâtrales Jeunesse, 2013
Neuf solos, cinq duos, trois trios, trois quatuors, un septuor, au total vingt-etune gammes pour découvrir ce qu’est le théâtre, s’entraîner, interroger l’évidence, apprendre à être avec les autres. Pièce-programme en vingt-et-une leçons progressives qui posent des questions essentielles, à mettre en acte que l’on soit amateur, professionnel, enfant, adolescent, adulte. À partir de quand ça commence une pièce de théâtre ? À partir de quand devient-on un personnage ?... Distribution modulable. 

CHALANDON        Sorj Le quatrième mur, roman, Grasset, 2013. -327p.
Février 1982. Pour respecter la promesse faite à son ami Samuel Akounis, célèbre metteur en scène en train de mourir d’un cancer et incapable de mener à bout son dernier projet, Georges, trentenaire, étudiant attardé et théâtreux, quitte femme et enfant pour monter l’Antigone d’Anouilh au Liban, presque quarante ans après sa création à Paris sous l’occupation nazie. Une seule et unique représentation est prévue, dans un vieux cinéma en ruine de Beyrouth. La distribution a été difficile à réunir : Antigone est une Palestinienne sunnite, Hémon, un Druze ; Créon et la Nourrice sont chrétiens ; les deux gardes, le Messager, la femme de Créon sont chiites ; Ismène est catholique arménienne... L’invasion du Liban par Israël met fin à l’aventure. La mort de certains comédiens, notamment celle d’Antigone-Imane lors du massacre du camp de Chatila, achèvera de rendre Georges fou : il choisira de mourir en beauté sous les balles syriennes, de traverser la quatrième mur «une kippa sur la tête», cadeau de son ami Samuel “et une clef dans la main”, celle qui avait fermé la maison de la famille d’Imane, expulsée de Jaffa en février 1948. “Je n’ai toujours pas compris ce que votre théâtre venait faire dans notre pays. La paix ? Il en faut bien plus. Nous divertir une heure ? Alors merci bien, mais n’en rajoutez pas (...) Personne n’est au-dessus de la guerre” l’avait prévenu Marwan, son guide, interprète et chauffeur.

 

THÉÂTRE PUBLIC        Théâtre et néo-libéralisme, n° 207 janvier-mars 2013. – 117p       SIÈCLE 21     Littérature contemporaine de Finlande - Hors cadre Armand Gatti : Parler le langage des arbres dans le vent par Catherine Brun – Habiter un espace utopique par Olivier Neveux – Gatti, un ciné-poète par Isabelle Marinone – Nous ne dirons pas l’histoire, nous dirons l’univers par Michel Séonnet- - L’arbre - Jean Trepperel, n°22, printemps-été 2013. -254p, ill.
Londres, 1940. Dans une bibliothèque publique dont le toit a été soufflé par une bombe, trois hommes, debout parmi les gravats, examinent des livres sur les rayonnages pas encore totalement détruits. C’est la photo choisie par la revue trimestrielle Théâtre / public pour illustrer son numéro sur « Théâtre et Néo-libéralisme ». Onze contributeurs. À la question de Martial Poirson « La politique culturelle est-elle soluble dans le néo-libéralisme ? (2007-2012) Jean-Claude Pujol fait écho : « Théâtre et néo-libéralisme : un oxymore ! » Fondée en 2002, la revue semestrielle de littérature & société Siècle 21 entame sa treizième année d’existence, avec une formule éprouvée : un dossier consacré à une littérature contemporaine étrangère (Inde, Afrique , Chine, Grèce, Tunisie…), un « hors cadre » sur un auteur (Michon, Quignard, Koltès…), une petite anthologie de textes sur un thème (la musique, le mur, le secret…) Au programme de ce numéro 22, un panorama de la littérature finlandaise ; quatre articles sur Armand Gatti, notamment sur les deux monuments publiés chez Verdier (La parole errante, 1999 et La Traversée des langages, 2012) et, en harmonie avec l’habitant de « La Maison de l’arbre », une dossier sur… l’arbre.

 

      

 

IDÉE Jean-Claude L’impromptu d’Argentan ou Le réveille-matin du théâtre (Manifeste pour une université populaire du théâtre). Préface de Michel Onfray, Autrement, 2013.-110p.

Michel Onfray, fils d’un ouvrier agricole et d’une femme de ménage, raconte qu’il a découvert le théâtre à sept ans, lors d’une retransmission en noir et blanc à la télé des Perses d’Eschyle. C’était en novembre 1966. Depuis, le fondateur de l’ université populaire de Caen où il donne des cours de « contre-histoire », s’est essayé au théâtre. Il a écrit et publié plusieurs pièces dont Le Songe d’Eichmann. C’est ainsi qu’il a rencontré le metteur en scène Jean-Claude Idée. « Pour sortir le théâtre d’une impasse mondaine et nihiliste », les deux hommes ont décidé de créer une Université populaire itinérante du théâtre dont le premier principe est la gratuité. Dans l’esprit du TNP de Jean Vilar, ils se donnent pour objectif de remettre la raison, la réflexion et la connaissance au cœur du théâtre, « par le moyen de la représentation publique de textes à caractère philosophique, éthique, civique, historique et politique. » Pour lancer le débat, J-C Idée a écrit un impromptu-manifeste, où nantis de la culture, directeurs du théâtre privé, un prof désespéré, des spectateurs populaires se donnent la réplique, jusqu’au chœur final des « enragés » : « Coupons la tête et les oneilles aux marchands du Temple qui confondent art et business ( … ) Coupons la tête aux responsables politiques qui ronronnent avec les cultureux, et qui les ont crus quand ils ont dit que le théâtre social ne fait pas chic ! que le théâtre scolaire ne fait plus choc ! que le théâtre politique est ringard ! que le théâtre philosophique est has been ! que le théâtre qui propose la transmission des classiques ne peut s’envisager qu’au prix d’une relecture transgressive et radicale...Cornes au cul. »

 

DELBO Charlotte        Qui rapportera ces paroles ? – La théorie et la pratique – La capitulation - La sentence – Et toi, comment as-tu fait ? - Maria Lusitania – Le coup d'État – La ligne de démarcation – Les hommes, Fayard, 2013
GELLY Violaine – GRADVOHL Paul        Charlotte Delbo, Fayard, 2013. -322p.
Depuis plusieurs années, la plupart des pièces de Charlotte Delbo (1913-1985), publiées chez Anthropos ou P. J. Oswald, étaient épuisées. Le travail obstiné mené par certains éditeurs, comme la revue Théodore Balmoral ou HB éditions, maintenait sa présence, laissait entrevoir un continent. Pour la première fois, aujourd'hui, sont enfin réunies en un seul volume, neuf de ses dix pièces connues.
Un seul texte est réellement inédit Et toi, comment as-tu fait ? (1971). Il fait partie - avec Qui rapportera ces paroles ? (1966), Ceux qui avaient choisi (1967, absent du recueil, mais publié chez Les Provinciales en 2011), Les hommes (1978) - du travail de Delbo pour le théâtre, réalisé à partir de son expérience de résistante et de déportée. Ces quatre pièces témoignent de quatre moments : son incarcération à la prison de La Santé puis au fort de Romainville et la mort de l'homme aimé, Georges Dudach (1942) ; la déportation (1943-1944) ; le retour à la vie (1945 et après) ; l'impossible oubli, même vingt ans plus tard au soleil de la terrasse d'un café de la place Syntagma à Athènes. Elles viennent compléter, sans les doubler, ses récits publiés chez Minuit à la moitié des années soixante (Le convoi du 24 janvier, sa trilogie Auschwitz et après), qui lui ont valu un début de reconnaissance, d'être mise au même rang que Primo Levi.
Les six autres pièces montrent une femme à l'écoute de son temps, lucide, réactive. Écrites toujours en peu de jours, elles sont inspirées par l'histoire contemporaine, suivent de très près l'actualité: La théorie et la pratique a pour sujet la rencontre, en avril 1968, de deux sociologues, l' l'allemand Herbert Marcuse et Henri Lefebvre (elle travailla au CNRS avec dernier); La capitulation, finie d'écrire en octobre 1968, porte sur l'invasion de la Tchécoslovaquie par « le grand frère » et ami russe ; écrite en décembre 1970, La Sentence réagit à la parodie de procès faite aux militants basques par le dictateur Franco. Le coup d'État (août 1971) rappelle celui, manqué, contre Hassan II au Maroc, l'enlèvement de Ben Barka. Maria Lusitania évoque la révolution des oeillets au Portugal (avril 1974), La ligne de démarcation, juillet 1975, le renversement d'Allende au Chili.
Rédigées entre 1968 et 1978, ces dix pièces permettent de mesurer la place importante que joue le théâtre dans son oeuvre, et aussi d'envisager l' influence qu'il a pu avoir sur son oeuvre narrative. On savait déjà par le récit qu'elle avait fait d'une représentation du Malade imaginaire à Auschwitz, comment le théâtre lui avait permis de survivre durant l'expérience concentrationnaire ; il n'est pas interdit de mettre en lien la précision des souvenirs rapportés dans la Trilogie avec la mémoire exceptionnelle de la jeune sténo-dactylo qui s'est aiguisée pendant trois ans au côté de Louis Jouvet dont elle était devenue l' assistante. La parution de la première biographie consacrée à Charlotte Delbo vient combler de nombreux trous, elle ouvre de nouveaux champs de réflexion, notamment les passages concernant son passage à l'ONU ou son attitude pendant la guerre d'Algérie. Les deux livres vont permettre au grand public de découvrir enfin la vie et l'oeuvre d'une femme d'exception.

RABONI Giovanni        Alceste ou le théâtre de l'exil / Alcesti o la recita dell'esilio, traduit de italien par Muriel Gallot, Presses Universitaires du Mirail, 2013
Pourchassés par les brigades spéciales qui menacent de les enfermer dans un stade ou un vélodrome, Sara et son mari Stefano accompagnés de Simone, père de ce dernier, sont contraints de quitter leur pays. Dans l'attente du camion qui doit les transporter, ils sont conduits par leur passeur dans un théâtre vide qui leur sert de refuge pour une heure. Mais un changement de dernière minute vient bouleverser l'accord conclu : finalement il n'y aura de la place que pour deux d'entre eux ... Le titre de la pièce ne renvoie pas au personnage misanthrope de Molière mais à l'épouse aimante d'Admète qui, dans la tragédie d'Euripide, se sacrifie par amour.

DEMATTÉ Angela        J'avais un beau ballon rouge, traduit de l'italien par Caroline Michel et Julie Quénehen, Les Solitaires Intempestifs, 2013.
Vie et mort de Margherita Cagol, dite Mara, militante révolutionnaire italienne, compagne de Renato Curcio, morte les armes à la main dans un affrontement avec la police. Née dans une bonne famille - sa mère est pharmacienne - éduquée dans la foi catholique, la jeune fille fait de brillantes études de sociologie à l'université de Trente. Après son doctorat, elle se radicalise, passe du maoïsme à la lutte armée et fonde à Milan le groupe des Brigades rouges. L'un des épisodes les plus connus de sa courte vie reste l'attaque réussie contre la prison où était enfermé son mari. Témoignage sur l'histoire italienne d' octobre 1965 à juin 1975, date de sa mort, la pièce ne donne pas d'explication : vue à travers les yeux de son père, second protagoniste de la pièce, la transformation de Margherita en Mara reste un mystère.

KRAUS Karl        Je n'ai aucune idée sur Hitler, traduit de l'allemand par Pierre Deshusses, Agone, 2013
Adaptation pour la scène par José Lillo du texte de Karl Kraus (1874-1936) Troisième nuit de Walpurgis. Écrite en cinq mois entre mai et septembre 1933, à partir d'éléments recueillis dans la presse et à la radio, cette analyse, publiée partiellement l'année suivante dans sa revue Le Flambeau, prouve irréfutablement que “toutes les informations étaient disponibles sur ce qui se passait déjà, et qu'elles suffisaient bien, à celui qui n'avait pas perdu sa capacité de lire, pour comprendre ce qui allait se passer.”

POP-CURSEU Stefana Pour une théâtralité picturale. Bruegel et Ghelderode en jeux de miroirs, Facultatea de Teatru si Televiziune Cluj, 2012. -235p, ill. POP-CURSEU Stefana - POP-CURSEU Ioan – MANIUTIU Anca – PAVEL-TEUTISAN Laura – ENYEDI Delkia (sous la direction Regards sur le mauvais spectateur, Presa Universitaria Clujeana, 2012. - 345p, ill.

Édités par l’université roumaine de Cluj, ces deux passionnants livres sont publiés en français. Pour comprendre et expliquer le “passage au théâtre” d’une image peinte, l’auteure roumaine Stefana Pop-Curseu étudie, en miroir l’une de l’autre, la peinture de Pierre Bruegel l’Ancien et la dramaturgie de Michel de Ghelderode, en soulignant les correspondances entre les différentes mises en cadre(s) et mises en scène(s) d’un imaginaire religieux et folklorique. commun. À partir de cette analyse, elle élargit son propos et propose une théorie de la théâtralité picturale, “valable dans toute l’histoire du théâtre européen.” Prenant le contre-pied des études visant à définir le « spectateur idéal », vingt-six chercheurs de plusieurs nationalités (française, roumaine, camerounaise, grecque, italienne, canadienne...) tentent un portrait du « mauvais spectateur ». Ce spectateur non-désiré peut prendre tour à tour le visage d’un enfant, jeune spectateur innocent, non éduqué, ne connaissant pas les conventions théâtrales, ou inversement celui d’un critique en fin de carrière, ayant vu tous les spectacles, constatant avec lassitude le recyclage des formes artistiques. Parmi les différents cas de réception analysés, on notera particulièrement celui des clowns thérapeutes, intervenant en hôpital avec des enfants malades, coincés entre les préoccupations du personnel soignant et la peine des parents, et celui de la compagnie italienne Magazzini Criminali qui, en 1985, fut obligée de changer de nom, perdit le théâtre qu’elle occupait et ses subventions, suite à une unique représentation de son spectacle Genet à Tanger, dans un abattoir en activité : une partie des journalistes laissèrent croire que les acteurs avaient eux-mêmes abattu et équarri sur scène, un cheval.

PRÉVERT Jacques        Les Enfants du paradis. Le scénario original, Arte éditions / Gallimard, 2012. -173p. ill.
Comédien, membre du groupe Octobre, poète, Prévert fut le scénariste de Carné pour Drôle de drame (1937), Le Quai des Brumes (1938), Le jour se lève (1939), Les Visiteurs du soir (1942). Tourné en 1943, Les Enfants du paradis se déroule vers 1828, dans le théâtre des Funambules, installé à Paris boulevard du Temple. En raison du privilège accordé notamment aux Comédiens-Français, les artistes de ce théâtre forain sont contraints d'entrer en scène sur les mains, de ne pas parler, etc. Réduit au silence, le mime blanc Baptiste Deburau (Jean-Louis Barrault) va y rendre fameux son personnage de Pierrot ; Frédérick Lemaître (Pierre Brasseur) y fera ses débuts, avant de devenir célèbre pour ses compositions de Robert Macaire dans « L'auberge des Adrets », de Ruy Blas ou d'Othello. À noter dans la distribution, les présences d'Arletty (Garance), Maria Casarès (Nathalie), Marcel Herrand (l'assassin Lacenaire), Étienne Decrou (Anselme Deburau), Pierre Renoir (le marchand d'habits).

AL JOUNDI Darina        Ma Marseillaise, L'Avant-scène / Quatre-vents, 2012
Noun, l'héroïne du Jour où Nina Simone a cessé de chanter, a quitté le Liban pour s'installer à Paris. Après avoir affronté la guerre, la drogue, les coups, l'hôpital psychiatrique, les snipers, les voitures piégées, les hommes, Noun se livre à un nouveau combat : obtenir la nationalité française. Au rythme des couplets de La Marseillaise, hymne national français qu'elle a appris par coeur, investie de sa nouvelle mission, elle interroge les fondements de la laïcité de sa terre d'accueil et rend hommage aux combattant(e)s pour la liberté (des femmes) des pays qu'elle a
parcourus: May Ziadé première Égyptienne entrée à l'université du Caire, Huda Sharawi, Nabawyia Moussa, première fille à avoir eu le droit de passer son bac au Liban, Leïla (9 ans) morte excisée, Rajia enterrée jusqu'à la tête et lapidée, Taslima Nasreen, Djemila Benhabib... mais aussi Averroès, Khayam, Abou Nawas, Al-hallaj.

SONNTAG Frédéric        George Kaplan, Théâtrales, 2012
Quel est le lien entre un groupe d'activistes clandestins, (type Anonymous) en train de rédiger un communiqué-manifeste, une équipe de scénaristes en quête de nouveaux concepts, scénari pour un projet de série télé commandité par un groupe anonyme, un gouvernement invisible aux prises avec un danger menaçant la sécurité intérieure du pays ? Un seul nom: George Kaplan, nom d'un personnage du film d'Alfred Hitchkock La Mort aux trousses.

DAENINCKX Didier        Le Banquet des affamés, Gallimard, 2012
La vie aventureuse de Maxime Lisbonne (1839-1905), soldat en Crimée puis en Algérie, comédien, condamné à mort et déporté en Calédonie pour sa participation à la Commune, compagnon de Louise Michel, metteur en scène de ses oeuvres, directeur des Bouffes-du-Nord, fondateur du journal L'Ami du peuple, auteur de théâtre censuré, inventeur du théâtre déshabillé (mimodrame ancêtre du strip-tease), orateur, dresseur de lions édentés pour faire fuir les huissiers, fondateur de cabarets comme Les Frites révolutionnaires, La Taverne du bagne où les serveurs étaient habillés en forçats... «Le Banquet des Affamés », repas gratuit offert aux misérables, préfigure Les Restaurants du coeur.

 

VIVANT Elsa        Qu’est-ce que la ville créative?, PUF, 2009.-89p.
Ce passionnant essai, publié dans la collection “La ville en débat” dirigée par Jacques Donzelot, fait le point sur la place et le rôle de l’artiste dans la ville. Il signale l’enjeu actuel liant urbanisme, culture et créativité, montre l’imbrication des politiques culturelles dans les stratégies urbaines, avec en arrière plan une question cruciale: dans le cadre de la compétition interurbaine comment attirer les entreprises et les investisseurs, surtout quand il s’agit de régénération, de revitalisation d’une ville touchée par le déclin économique, la désindustrialisation?
Si elle s’appuie sur des exemples américains (Soho, Greenwich Village à Newyork), anglais (Hoxton, Shoreditch à Londres), espagnol (Bilbao) Elsa Vivant se base largement sur la situation parisienne (Belleville, Montreuil, le Marais...) considérée comme le modèle de l’évolution des grandes villes françaises.
Elle commence par une présentation de deux concepts essentiels dus à l’universitaire américain Richard Florida.
Elle analyse tout d’abord les trois indicateurs statistiques permettant selon Florida d’identifier rapidement une “ville créative”, les désormais fameux “3 T”: le nombre de diplômés bac+4 ( indice de talent), le nombre de brevets déposés (indice de technologie), les taux d’étrangers, d’artistes, de couple homosexuels, (indicateur de tolérance).
Elle analyse ensuite le concept de “classe créative”. Le terme de créateur réservé à l’artiste a été peu à peu récupéré par les metteurs en scène de théâtre, les commissaires d’exposition, les réalisateurs de films, revendiqué par des “créatifs” comme les cuisiniers, les publicitaires. Par glissement sémantique, il en est venu à désigner tous “ceux qui inventent des solutions nouvelles en dehors d’une production routinière et répétitive”. Florida regroupe sous le terme fourre-tout de “classe créative” des professions très différentes, représentant 30% des actifs, 50% des salaires et 70% du pouvoir d'achat : à côté des artistes, on y trouve les scientifiques, les chercheurs, les ingénieurs, les architectes mais aussi, car métiers très qualifiés et innovants, les juristes, les avocats d’affaires, les managers de hedge funds, les médecins, les maquilleurs, les techniciens du spectacle...
Elle montre comment la révalorisation de zones à l’abandon, de centres-villes ou de quartiers dégradés s’accompagne d’ un scénario désormais bien rôdé depuis les années 70: à l’arrivée des artistes, pionniers et moteur d’une requalification symbolique, succède l’arrivée de travailleurs intellectuels précaires bientot suivie d’une revalorisation foncière et par l’arrivée des cadres de la classe supérieure. À la fin du cycle, après l’expulsion des habitants de la classe populaire, la frange bohème, cette minorité d’ artistes créateurs pionnière du processus, est à son tour expulsée du territoire par le reste des “créatifs”.
Pour conclure, Elsa Vivant note que le processus de gentrification a paradoxalement deux autres résultats: il aboutit à une banalisation de l’espace urbain (toutes les centre-villes se ressemblent) et à une inhibition de la créativité des lieux promus comme tels. Elle invite l’urbaniste, l’ élu politique, le responsable d’institution culturelle à accepter la présence de scènes off, de lieux échappant aux contrôles, régulations et instrumentalisations car c’est là qu’est la “ville créative”, lieu des rencontres imprévues, improbables qui nous dépassent.

PONTCHARRA Natacha de        L 'Angélie, Quartett, 2009
Ouvrière à la chaîne dans une usine, la mère de Victor a disparu depuis trois semaines au bord d’un étang, emportant avec elle le secret de sa naissance. Venu récupérer les affaires de sa mère, Victor trouve par hasard dans son lit, entre les plumes du matelas: un cahier. Début d’une explication, d’une mise en abyme, d’une plongée dans un temps qu’on ignore où “le cuir se mâchait le soir aux angles du feu”, dans un autre monde peuplé de chasseurs, de chevaux nains... Onze ans après la création de la pièce, est (enfin) publié ce texte, où Natacha de Pontcharra à la suite de William Blake, Victor Hugo ou Wim Wenders part à la rencontre de l’ange, créant avec Ziza, un remarquable personnage féminin.
Sache qui tu réclames: Un tombé, capable aujourd’hui seulement d’un amour assorti de blessures, d’une consolation rompue de coups. Ne t’aveugle pas sur la clarté de mes veines, là-dedans la boue se charrie contre les étoiles.”

JEANNENEY Jean-Noël        L'un de nous deux, Portaparole, 2009.
Jorge Semprun, dans sa pièce autobiographique “Le retour de Carola Neher”, (Gallimard,1998 ) avait fait de Léon Blum l’un des fantômes qui hantait la mémoire du dernier survivant des camps de concentration, revenu à Weimar pour y mourir. Il montrait Blum pique-niquant avec Goethe sur l’Ettersberg, leur dialogue prolongeant “Les entretiens avec Eckermann”.
Comme Semprun, Jeanneney revient à Weimar-Buchenwald, où l’homme politique fut retenu en otage dans une petite maison, non loin mais hors de l’enceinte du camp de déportés, ne sachant nommer cette étrange odeur qui en provenait. Dans un huis clos de facture très classique, il le confronte à Georges Mandel, homme politique proche collaborateur de Clémenceau, avec qui Blum fut enfermé à partir de mai 1943. L’action est recentrée sur les dernières vingt-quatre heures que les deux hommes passèrent ensemble. Le 28 juin 1944, suite à l’assassinat du ministre de la propagande Philippe Henriot, réalisé par la Résistance, Mandel était livré par les Allemands à la Milice qui, en représailles, l’exécutait le 7 juillet dans la forêt de Fontainebleau.
Jeanneney est l’auteur d’un essai historique sur Mandel, publié en 1991. Trois ans plus tard, le maire de Neuilly de l’époque, actuel président de la République, s’emparait du sujet pour en faire un livre, adapté au cinéma sous le titre “Le dernier été” , film de Claude Goretta, avec, dans le rôle principal, Jacques Villeret.

DOLMIEU Dominique - SYMANIEC Virginie        La Montagne des langues, anthologie des écritures théâtrales du Caucase, L'Espace d'un instant, 2009. -425p.
Un choix de trente-trois extraits et de quatre courts textes intégraux, pour découvrir trente-sept auteurs ayant vécu ou vivant entre mer Noire et Mer Caspienne. Traduits de l’azéri, de l’arménien, du géorgien, du tchétchène, de l’adyghé, du karatchaï, du kabard, les textes des dramaturges sont présentés dans un ordre chronologique. D’Akhundzadé (1812-1878) à Mourat Gourfov (né en 1986), ce premier panorama s’étend sur cent cinquante ans. Occasion de découvrir une littérature théâtrale récente et méconnue, de nombreux textes étant inédits, puis de l’approfondir, en allant lire l’intégralité des pièces pour la plupart déjà publiées.

RANDAZZO Francesco        Per il bene di tutti / Pour le bien de tous, traduit de l'italien par Laura Brignon, Presses Universitaires du Mirail, 2009
Cas isolé dans l’édition théâtrale française, la collection Nouvelles Scènes s’attache à proposer en version bilingue des pièces d’auteurs contemporains européens (espagnols, allemands, tchèques, polonais, italiens...). Le texte de Francesco Randazzo a été écrit en 1996, bien avant que le gouvernement italien ne légalise les ”rondes” de citoyens ou qu’en France ne se développent les groupes de “voisins vigilants”. L’action se déroule en un jour, en un lieu: dans un petit village frontalier d’un pays catholique (indéfini) et plus précisément dans la supérette du village.
C’est là, autour du couple de commerçants propriétaire du libre-service, que se réunissent le docteur du village, un employé municipal, le garagiste, un jeune skinhead (naziskin en italien).Ce petit groupe de braves gens, excédés par le laxisme de la police, s’est organisé en milice armée anti-immigrés et patrouille chaque nuit au bord du fleuve qui marque la frontière, n’hésitant à y rejetter les clandestins qu’il intercepte, “pour le bien de tous”. Lorqu’au matin, le rideau de fer de la supérette se lève et l’action commence, on se rend compte rapidement que la nuit a été agitée : contrairement à la procédure habituelle, un étranger capturé a été ramené, l’”animal sauvage” est enfermé dans la cave. Le groupe de citoyens n’a pas encore statué sur son sort. Ce soir, il le fera en votant démocratiquement.

AL-QASIMI Bin Muhammad        Œuvres dramatiques : La cause - Nemrod - Le retour d'Hulagu - Alexandre Le Grand - La réalité - Samson, traduit de l'arabe par Khalifa Soua, L'Harmattan, 2009
Né en 1939, l’auteur est l’actuel gouverneur (cheikh sultan) de Sharjah, l’un des Émirats arabes unis. Passionné de théâtre depuis sa jeunesse, il montre ici son intérêt pour la vie de personnages illustres (Samson, Nemrod, Alexandre Le grand) et revisite différents épisodes marquants de l’Histoire qu’il met en résonance avec la situation contemporaine: prise de Jérusalem en 1187 par Saladin et la reconquête du royaume de Palestine, prise de Bagdad en 1258 par le Mongol Hulagu (petit-fils de Gengis Khan, frère de Möngke Khan et Kubilai Khan) qui mit fin au califat abbasside en tuant le trente-septième calife Al-Musta’sim, chute de Grenade en 1492 et expulsion des musulmans d’Espagne.

LEBEL Jean-Jacques - MICHAËL Androula        Happenings de Jean-Jacques Lebel ou l'insoumission radicale, Hazan, 2009. - 320p, ill.
C’est incontestablement à Allan Kaprow que revient la paternité du terme happening désignant une action artistique, mais ne sommes-nous pas fondés à poser la question de savoir si le fait de promener un homard en laisse sur les boulevards, comme l’a fait Gérard de Nerval, à Paris, au XIXème siècle, ne mériterait pas d’être considéré comme un happening avant la lettre? ” s’interroge Jean-Jacques Lebel. Pour lui, le happening a pris naissance dans le mouvement Dada à Berlin, en 1920 avec la course entre une machine à écrire et une machine à coudre de Groez et Mehring. C’est un phénomène international, rhizomique. Ce n’est pas un produit industriel, c’est une oeuvre éphémère, unique, invendable. Ouvrant ses archives personnelles, il présente une vingtaine de ses happenings. La série commence le 14 juillet 1960, en pleine guerre d’Algérie, quelques mois avant le Manifeste des 121, avec L’enterrement de la Chose à Venise. Elle s’achève à Parme avec Golden Duck Soup, le 23 mars 1968, juste avant les “évènements de mai 68” considérés par de nombreux commentateurs comme “le plus grand happening de tous les temps.” Difficilement reproductibles, les happenings de Lebel sont des oeuvres “collégiales, voire tribales” auxquelles contribuèrent de nombreux artistes (peintres, poètes musiciens, danseurs): Gregory Corso, Lawrence Ferlinghetti, Daniel Pommereulle, Erro, Robert Filliou, Yoko Ono, les Soft Machine, le Living Theater, Ben...

COLTIER Alain        Mexico 68, trois hommes, un destin, ABS, 2009
Le 16 octobre 1968, durant la cérémonie de remise des médailles du 200 mètres, deux athlètes noirs Tommie Smith (médaille d’or), John Carlos (médaille de bronze) osent lever, face au monde entier, un poing ganté de noir, sur le podium des Jeux Olympiques de Mexico, tandis que résonne l’hymne américain. À côté d’eux, solidaire de l’action, l’Australien blanc Peter Norman, médaille d’argent, arbore sur son survêtement le macaron de l’Olympic Project for Human Rights (OPHR). Tous les trois paieront très cher cet acte qui stupéfia le monde entier et qui est classé au 6ème rang des faits de société du XXème siècle. La pièce écrite par un auteur plus connu jusqu’ici comme journaliste sportif se situe quelques instants avant que les trois hommes s’immobilisent pour l’image immortalisée par le photographe John Dominis. Ils sont seuls dans les sous-sols du stade, dans la salle d’attente du podium. En arrière-plan, la rumeur du stade olympique de Mexico (applaudissements, voix du speaker). Dans la tête des deux champions noirs, repassent les discours de Martin Luther King, Malcolm X ...

STOPPARD Tom        Rock ‘n roll, traduit de l’anglais par Lulu et Michael Sadler, Actes Sud-Papiers, 2009
Scénariste pour le cinéma (Brazil, Shakespeare in love), traducteur et adaptateur de pièces de Vaclav Havel, Mrozek, Garcia Lorca, Tom Stoppard est avant tout un dramaturge, célèbre dès 1966 avec sa pièce Rosencrantz et Guildenstern sont morts. Né en Tchécoslovaquie en 1937, devenu citoyen britannique, il n’a jamais perdu le contact avec son pays d’origine et avec l’ histoire qui se développait de l’autre côté du “rideau de fer.” Dans Dogg’s Hamlet, Cahoot’ s Macbeth par exemple, il racontait comment une représentation de Macbeth dans un salon était perturbée par l’arrivée de la police, de fameux comédiens tchèques interdits de scène suite à l’échec du Printemps de Prague étant forcés pour survivre de faire du théâtre en appartement.
Sa dernière pièce traduite en français écrite en 2006 n’arrête pas de faire des allers-retours entre l’Angleterre et la Tchécoslovaquie. L’action s’étend sur 22 ans. Elle commence en août 1968 à Cambridge où Jan prépare un doctorat. Le jeune étudiant annonce à Max son professeur et père spirituel, à Eleanor sa femme (enseignante de grec ancien, spécialiste de Sapho, en lutte contre un cancer qui la détruit) à leur fille Esmé, jeune hippie de 16 ans, qu’il repart pour Prague où les chars russes viennent de pénétrer. La pièce se termine en août 1990 à Prague où après une visite au mur de John Lennon, les protagonistes vont assister à un concert des Rolling Stones au stade de Strahov. La musique, passion de Jan, est le fil conducteur de la pièce, régulièrement ponctuée de chansons: celles de Bob Dylan, du Velvet Underground, du Plastic People of the Universe (groupe tchèque qui va valoir à Jan un passage en prison et la destruction par la police de tous ses disques 33 tours ). Chansons aussi et surtout de l’énigmatique Syd Barrett guitariste, chanteur, cofondateur des Pink Floyd. C’est lui qui ouvre Rock’n roll, en jouant seul de la flûte, tel le dieu Pan, juché sur le mur d’un jardin à Cambridge.

PINSARD Marielle       Les pauvres sont tous les mêmes ou Des chevreuils à vive allure - La Truite - Construis ta jeep - Nous ne tiendrons pas nos promesses, Bernard Campiche, 2009
Dans “Construis ta jeep” (monologue) un jeune chirurgien richissime, spécialiste de l’estomac et de ses cancers, parle de sa vie “difficile”: une femme à la campagne qu’il voit le week-end, un chien, un 4x4 gris spécial édition limitée dont il est très fier, ses voisins qui lisent “Le Monde diplomatique" et “Courrier international”: “Quand vous avez de l’argent vous n’êtes pas toujours bien compris.
Dans “Les pauvres sont tous les mêmes”, pièce qui donne son titre au recueil, trois femmes décomplexées parlent avec cynisme de ces mendiants puants qui hantent les rues, s’affalent à terre, tendent la main pour demander une petite pièce, particulièrement devant les distributeurs de monnaie. Ne devrait-on pas leur apprendre à dire “bonjour”? Ne devraient-ils pas prendre exemple sur leurs collègues d’Inde qui vendent “du baume du tigre, des objets de leur confection et toujours avec le sourire”?
La culpabilité est au centre de “Nous ne tiendrons pas nos promesses”. Un petit groupe d’amis “très écolo” est réuni autour d’un repas et d’un écran plat pour leur cercle de paroles mensuel. Jane ne peut manger que des aliments à base de farine écrasée à la pierre de meule. Béa déjà petite ne pouvait rien manger sinon elle vomisssait dans la Jaguar sur le cuir en veau élevé sous la mère “Où sont passées les serviettes en lin équitable? “demande Yvonne, la maîtresse de maison, à son amant africain de 20 ans plus jeune qu’elle. Une fois qu’on aura fini de manger et Béa de vomir ses huîtres, on fera une liste de voeux citoyens: “Il faut se mobiliser contre les aliments génétiquement modifiés, il faut boycotter la Saint-Valentin, fête marchande, sexiste et homophobe, il faut se rendre compte de la rareté de l’eau...” car “nous ne sommes pas responsables mais cela ne nous empêche pas de nous sentir responsables (...) Nous ne serons jamais dupes de ce que nous savons de ce vaste monde.”
Observatrice des contradictions de la société, Marielle Pinsard, née en 1968, fait entendre une nouvelle voix, pleine d’humour, dans le théâtre suisse.

GREENBERG Tamir      Hébron, traduit de l'hébreu par Laurence Sendrowicz, Théâtrales, 2009
Quand Dieu est silence et les hommes incapables de dénouer la situation, la Terre entre en scène et tranche. Hébron aujoud’hui. Le maire palestinien Canaani a été destitué, la ville est passée sous contrôle du gouverneur militaire israélien Maimon. Pour venger son père, Halil tente de tuer le gouverneur mais tue “accidentellement” son fils de trois ans. Les représailles commencent. Le fils (7 mois) de Halil est pris en otage puis tué “accidentellement”, la maison de la famille Canaani est rasée, l’ oliveraie familiale est détruite par l’armée israélienne. Les mères s’opposent à ce que les corps des deux enfants soient enterrés et appellent à la vengeance. De nombreux incidents éclatent entre les deux communautés qui s’entretuent. Le sang coule. Quand finalement les deux enterrements ont lieu, la Terre se révolte et expulse les morts de ses entrailles. Laissés à l’air libre, les cadavres pourrissent et déclenchent une épidémie. Suite à la mort de sa femme, le gouverneur met le feu à la ville. Seuls rescapés de la catastrophe, une petite fille, un petit garçon et un idiot sur une charrette tirée par un âne, s’extraient d'Hébron en flammes, ensevelie peu à peu sous la neige qui tombe. Avec ce nouveau texte, les éditions Théâtrales poursuivent leur travail de défrichage du répertoire théâtral israélien contemporain. Depuis trois ans, elles publient progressivement tout le théâtre d’Hanokh Levin. Cette année, elles donnaient aussi à lire le monologue du dramaturge arabe israélien Taher Najib, “À portée de crachat.”

LOEW Evelyne - RANCILLAC François      L’invention du théâtre public: La Scène natale, Le public a bien joué ce soir… d'Evelyne Loew - Jean Dasté, et après ? de François Rancillac, L'Amandier, 2009
En 1999, à partir de documents, de témoignages, E Loew revenait sur l’évènement que fut la naissance du Vieux-Colombier fondé en 1913 par Copeau, Dullin, Jouvet. Dans une seconde pièce écrite en 2005, elle reprend le récit en 1924, au moment où les Copeau (Jacques, Agnès, Marie-Hélène) avec Suzanne Bing, Jean Dasté, Léon Chancerel déménagent en province, en Saône-et-Loire à Morteuil puis à Pernand-Vergelesses. Rancillac, codirecteur et héritier de la Comédie de Saint-Étienne, revient en 2005 sur l’implantation de Jean Dasté à Saint-Étienne après un passage à Grenoble. Il retrace la naissance de La Comédie mais aussi celles des quatre autres premiers centres dramatiques nationaux appuyés par Jeanne Laurent (Baty à Aix-en-Provence, Gignoux à Rennes, Sarrazin à Toulouse, Pietri et Clavé à Strasbourg) ainsi que la nomination de Jean Vilar au TNP. Trois pièces pour raconter une histoire, celle de “l'invention du théâtre public”, celle de la décentralisation théâtrale, celle d’une transmission.

BADEA Alexandra      Contrôle d’identité - Mode d’emploi - Burnout L’Arche, 2009
Alexandra Badea, auteure et metteuse en scène roumaine, née en 1980 vit en France depuis six ans. Ses trois pièces écrites directement en français sont particulièrement en résonance avec l’actualité.
Contrôle d’identité est inspirée de l’histoire d’un jeune Kurde qui s’était suicidé dans un centre de rétention français, lorsqu’il avait appris qu’il allait être reconduit en Turquie, où il était condamné à mort.
Mode d’emploi raconte les tribulations d’une jeune Roumaine aux prises avec le ministère français de l’immigration et de l’intégration. ”Situation civile: marié, pacsé, divorcé, en couple, en couple avec un citoyen français résidant en France, en couple avec un ressortissant européen résidant en France ... Il faut cocher. ” Aurat-elle droit à la nouvelle carte de séjour “Compétences et talent”? “Ce qui n’est pas sur le papier n’existe pas. Mon nom existe. J’existe. Dans les papiers des autres.”
Burnout est entièrement consacré à ce syndrome d’épuisement professionnel consécutif à l’exposition à un stress permanent et prolongé, étudié par Herbert J. Freudenberger et Christina Maslach. Une jeune cadre dynamique est évaluée par le psychologue de l’entreprise: “Vous fatiguez-vous plus facilement? Ressentezvous souvent une tristesse inexpliquée? Êtes vous déçu par les gens qui vous entourent?...”(...)” Travailler plus.Pour gagner quoi?”.

CHIAMBRETTO Sonia      Chto - Mon képi blanc - 12 soeurs slovaques, Actes Sud-Papiers, 2009
Trois monologues consacrés à trois parcours, trois exilés qui ont fui à travers l’Europe pour arriver dans le Sud de la France. Le destin d’une jeune Tchétchène arrivée à Marseille est mis en regard avec celui d’un soldat engagé dans la Légion étrangère et avec celui d’une jeune Slovaque entrée en religion et en voie de sanctification. Parution en un volume des trois pièces publiées séparément en 2006 et 2007 chez Inventaire/Invention avec, inchangées, la mise en page et la typographie remarquables de la première édition.

BRESAN Ivo    La représentation de « Hamlet » au village de Mrdusa-d'En-Bas, traduit du croate par Johnny Kundid, L'Espace d'un instant, 2009
Yougoslavie, 1946-1948. Dans le cadre de la reconstruction du pays, de la lutte contre l'illettrisme, les instances au pouvoir encouragent l'organisation de représentations théâtrales pour élever le niveau culturel et renforcer la conscience socialiste de la population rurale. À Mrdusa-d'en-Bas, petit village de l’arrière-pays dalmate, les dirigeants locaux du Parti ne veulent pas être en reste et décident de monter “Hamlet”. Ils en confient la mise en scène à l'instituteur. Celui-ci est rapidement forcé de modifier la pièce de Shakespeare: il doit l'adapter aux acteurs - tous amateurs - qui trouvent le texte difficile et tenir compte de la nouvelle situation politique: “Vive la République de Danemark sous la sagesse éclairée du président Emmlet! “. Il lui faut aussi calmer les tensions qui secouent la troupe et rendent les répétitions mouvementées. Joko, le jeune comédien qui joue Hamlet n’en finit pas de se disputer avec le secrétaire du Parti en charge du rôle de Claudius: il lui reproche d’avoir fait envoyer injustement son père en prison alors que c'est lui qui a détourné l'argent de la coopérative. Écrite en 1966, la pièce n’a rien perdu de sa saveur quarante ans plus tard.

ROSE Reginald      Douze hommes en colère, traduit de l’anglais (américain) par Attica Guedj et Stephan Meldegg, L’Avant-scène, n°1272, 2009 Réédition.
Douze jurés sont enfermés pour délibérer sur le cas d’un jeune homme de 16 ans: accusé d’avoir tué son père avec un couteau à cran d’arrêt, il risque la peine de mort, la chaise électrique. La tâche s’annonce facile, tellement l’affaire semble évidente: deux témoins prétendent avoir vu l’adolescent tuer, on a retrouvé son couteau, il a eu une “première inculpation à dix ans pour avoir jeté une pierre sur son instit. À quatorze ans, il se retrouve en maison de correction parce qu’il a piqué une bagnole. Après ça, on l’arrête pour un vol à la tire, et puis pour une agression à l’arme blanche contre un autre gamin, deux fois de suite.” Même le défenseur de l’accusé, un avocat commis d’office, a semblé durant le procès peu convaincu de l’innocence de son client. En entrant dans la salle de délibération, les jeux semblent faits, tous les jurés pensent que l’accusé est coupable, sauf un, le juré n°8 un architecte: il a un doute. Il va falloir débattre car la décision doit être prise à l’unanimité. Écrite en 1953, la pièce a été portée au cinéma quatre ans plus tard par Sydney Lumet avec Henry Fonda dans le rôle du juré n°8.

BLUTSCH Hervé      La Vie burale, Voix navigables, 2009
Suite à l’apparition sur son corps de trois bubons qui gonflent puis explosent, Antoine découvre qu’il est possédé: son corps a été envahi par trois petites créatures, qui ressemblent étrangement à Olga, Étienne, Alexandre, ses collègues de bureau. Préoccupé par un contrat avec les Finlandais, stressé dans son travail, Antoine serait-il aussi victime de harcèlement moral? “C’est dans un bureau que tout a commencé... cette histoire de jardin, c’est une invention des botanistes...au départ, il y avait un bureau. C’est la première chose que Dieu créa: un bureau. Avec tout le mobilier.” Pour aller plus loin dans l’univers délirant de Blutsch, le même éditeur publie également le volume 3 de son “Théâtre incomplet” contenant la désopilante pièce “Ervart ou les Derniers jours de Frédéric Nietzsche”, parue précédemment chez Théâtre Ouvert.

NIANGOUNA Dieudonné      Souvenir des années de guerre: L'âge des maîtres impolis - L'amant de la tempête - La mort vient chercher chaussure - Carré blanc - Les murs sont gris - Pati patatra et des Tralalas - Les bagarreurs de la première heure - Couvre Gueule - Et le générale a dit je vous emmerde - Les Inepties volantes, Carnets-livres, 2009 + CD
La sortie chez Carnets-livres de ce second volume des pièces de Dieudonné Niangouna - dramaturge, comédien, metteur en scène congolais révélé par le festival des Francophonies en 2002 et qu’on a pu voir dans Les Inepties volantes lors du Festival d’Avignon 2009 - est une occasion pour saluer le travail de ses éditeurs. Créées par Daniel Besace et Francine Chatelain en 2005, les éditions Carnets-livres tranchent dans le paysage éditorial français. Leurs livres, tirés à 300 ou 400 exemplaires, sont de beaux objets entoilés avec des tissus africains, vendus à des prix raisonnables (entre 15 et 23€), diffusés par des libraires amis. Chaque livre est imprimé, façonné, relié par leurs soins puis numéroté. Au rythme d’une heure par livre, cent livres environ sont ainsi fabriqués par leurs mains chaque mois. Dans leur collection de théâtre, on trouve, outre les pièces de Dieudonné Niangouna (Trace), celles de Camille Amouro (Brenda Owward), de Jean-Luc Raharimanana (Fragments de cauchemar et autres fulgurances du gecko), de Romaric Maucoeur (Fantaisies mythologiques). À noter aussi une collection consacrée à Shakespeare, avec d’une part des pièces contemporaines inspirées par l’ univers shakespearien (Ophélie de Cabace) et d’autre part des rééditions d’anciennes traductions d’ "Hamlet” signées Pierre Letourneur (1776), Paul Meurice et Alexandre Dumas (1887).
http://carnets-livres.over-blog.net



ARRABAL Fernando      Le Château des quechuas, Collège de 'Pataphysique, CXXXVI
WEBER Jean-Marc       Autopsie d’un lâche ordinaire, Les Enfants du Paradis, 2009
Follement amoureuse de Michet, leader d’un mouvement de défense des sans-papiers, une duchesse a transformé tout un étage de son château en dortoir et l’a ouvert aux tentes “quechua” des immigrants. Cet asile est cerné par la police du ministère de l’Immigration, décidée à mettre fin à l’action humanitaire de Lerry et à capturer le dangereux terroriste Michet. Durant l’assaut, une balle met le feu aux réserves d’essence du château qui disparaît avec ses occupants dans les flammes... Fondateur en 1962 avec Topor et Jodorowsky du mouvement Panique, Arrabal est actuellement Satrape du Collège de ‘Pataphysique.
Dans la pièce de Weber, le personnage central avait vingt ans en 2009. Amateur de football, nationaliste, il est entré dans la police comme archiviste, puis a participé avec un groupe spécial à des exécutions dans la forêt, à l’incendie d’un bâtiment où deux cent femmes ont péri brulées. Projection vers un futur qui ressemble beaucoup au passé: quand la démocratie va jusqu’au bout d’une logique sécuritaire, l’histoire tourne en rond.

   

DICALE Bertrand - GONON Anne       Oposito, l’art de la tribulation urbaine, L’Entretemps, 2009. -192p, ill.
De L’Enfer des phalènes (1985) à son dernier spectacle Toro (2006), retour sur le parcours d’ une compagnie de théâtre de rue. Fondée par Enrique Jimenez et Jean-Raymond Jacob, elle a donné naissance à des spectacles originaux de grand format réunissant des milliers de personnes et aidé à la structuration des arts de la rue avec la création du Centre national des arts de la rue Le moulin fondu à Noisy-le-Sec. Un parcours marqué par les rencontres et compagnonnages avec d’autres compagnies et artistes comme Décor Sonore, Pierre Sauvageot, Thierry Lorent d’Annibal et ses éléphants, les Tambours du Bronx, Groupe F, Générik Vapeur... Un livre indispensable pour comprendre l’évolution des arts de la rue en France durant les vingt-cinq dernières années.

KARLE Vincent       Un clandestin aux Paradis, Actes Sud Junior / D’une seule voix, 2009
Élève de seconde, Matéo Leduc, le narrateur, est le fruit de l’union d’une enseignante et d’un policier (syndiqué, de ceux qui pensent que la police est “au service de la population”, “qui commencent à refuser d’obéir aux ordres pour faire du chiffre”). Matéo est un adolescent révolté, il aime “le shit et le tchat”. De temps en temps, il fait des crises de violence. Le psy dit que c’est à cause de ses parents, “figures doubles de l’autorité”.
Un jour, en plein cours d’histoire-géo, la gendarmerie déboule dans la classe, un chien circule entre les travées, flaire les cartables à la recherche de drogue. Matéo et son copain Zaher sont embarqués, mis en garde à vue. D’autres élèves du lycée aussi. À l’issue d’un procès, Matéo s’en tirera avec un sursis, une amende et beaucoup de culpabilité. Pour Zaher, innocent dans cette affaire, la justice a été expéditive: le lendemain même il avait été renvoyé en Afghanistan avec sa petite soeur (qui était en maternelle), son père journaliste étranger “en situation irrégulière”, eux qui avaient fui les talibans et demandé l’asile politique à la France.
Un monologue qui colle à l’actualité sur “la collaboration exemplaire entre les forces de l’ordre et l’Éducation nationale”.

SIMÉON Jean-Pierre       Le Testament de Vanda, Les Solitaires intempestifs, 2009
MALONE Philippe       Septembres, Espaces 34, 2009
NEGRI Antonio       Trilogie de la différence : Essaim - L’Homme plié - Cithéron, traduit de l’italien par Judith Revel, Stock, 2009.
Pour dire la souffrance tragique de l’individu, dresser le tableau d’un monde en ruines, dans l’impasse, Jean-Pierre Siméon et Philippe Malone choisissent dans leurs derniers textes publiés la forme du monologue, du poème dramatique.
Le Testament de Vanda ou les derniers moments d’une jeune mère étrangère, Vanda qui parle à son bébé dans un centre de rétention français avant de se suicider par pendaison.
Dans Septembres, Malone décrit l’inexorabilité du chemin intime qui conduit face, à la violence, sous la violence, à la violence, lorsque la beauté, l’avenir, la justice ont été tués. Il suit le parcours d’un enfant qui traverse la ville, monte vers la colline et en redescend, adolescent terroriste: “en fouillant dans ta chambre en creusant les décombres au milieu du vent j’ai trouvé cette ceinture avec des explosifs.“
“Que veux-tu, cela ne peut pas être pire”
déclare l’Homme, protagoniste de l’Essaim d’Antonio Negri. Lui-aussi est arrivé au bout et s’apprête à s’habiller du “vêtement de justice”. “Notre vie se déroule sous la menace permanente d’une guerre imposée, dans les peines quotidiennes de l’exploitation et de l’aliénation.” Le kamikaze serait-il la juste réponse de l’homme dénudé face à la volonté de destruction du pouvoir ? Dans un dialogue avec le Choeur, L’Homme va refuser le choix du martyre et découvrir que la rebellion est “imagination et joie.”

CONTAMIN Laurent       Les veilleurs de jour, illustrations de Laurent Corvaisier, Le Bonhomme vert, 2009
GERBAULET Françoise       Petit homme, illustrations de Sylvaine Jenny, Le Bonhomme vert, 2009
Les éditions du Bonhomme vert poursuivent le développement de leur collection de théâtre illustré avec ces deux pièces qui ont pour cadre principal une grotte. Grotte au bord de la mer, où Alex et son frère Pierrot rejouent dans Les veilleurs de jour, les origines du cinéma. Grotte préhistorique ornée de mains et de bisons où Camille (5 ans), l’héroîne de Petit homme, va trouver des réponses à ses interrogations, apprendre à lire, aimer grandir. ”Pourquoi je ne peux pas manger le mot pomme?” (à partir du CP)

GERBAULET Françoise

MAYORGA Juan       Le Garçon du dernier rang, traduit de l’espagnol par Dominique Poulange et Jorge Lavelli, Les Solitaires intempestifs, 2009
MAYORGA Juan       La Tortue de Darwin, traduit de l’espagnol par Yves Lebeau, Les Solitaires intempestifs, 2009
Le titre aurait pu être “Les nombres imaginaires”, “Le tableau vide” ou “Le labyrinthe du Minotaure”. Il a été suggéré à “l’auteur” par Germain, professeur de littérature, marié à Jeanne, galeriste, sans enfant. Responsable du Flambeau, le journal du lycée, Germain pense que “l’art doit illuminer le monde et non augmenter la confusion”. Il est désespéré par l’incapacité de ses élèves à faire une rédaction de plus deux pages racontant leur dernier week-end. Jusqu’au jour, où il découvre les talents de narrateur de Claude, 17 ans, “le garçon du dernier rang”. Il l’encourage à poursuivre les premiers feuillets écrits, lui conseille des livres, pense le guider dans cette histoire qui s’écrit sous nos yeux et dont il se rend compte trop tard qu’il en est l’un des protagonistes ... “Tu sais quelles sont les deux composantes d’une bonne fin? Le lecteur doit pouvoir se dire: je ne m’attendais pas à ça et pourtant ça ne pouvait pas finir autrement. Nécessaire et imprévisible.”
Dans La Tortue de Darwin, un historien voit débarquer à son domicile une petite vieille dame, lectrice attentive de son célèbre ouvrage Histoire de l’ Europe contemporaine. Elle lui fait remarquer différentes erreurs, concernant Verdun ou l’affaire Dreyfus. D’abord vexé, le grand professeur découvre rapidement qu’il a devant lui un témoin des deux cents dernières années. Malgré tous ses efforts pour dissimuler la véritable nature de ce spécimen exceptionnel, résultat d’ ”une évolution exponentielle”, il va devoir partager son “archive vivante” avec un savant (un peu fou) qui s’en servira comme cobaye pour des expériences douteuses. Il devra aussi s’opposer à sa femme Betty qui veut monter un spectacle dont “le monstre” serait l’attraction. “Je ne vois que des êtres qui se comportent comme des bêtes et d’autres qu’on traite comme des bêtes.” “Soyez gentil, déportez-moi aux Galapagos.”

BÄRFUSS Lukas Le Test (Ce brave Simon Coré) traduit de l'allemand (Suisse) par Johannes Honigmann, L'Arche, 2009
SALES Pauline Family art, Les Solitaires intempestifs, 2009
Comme Juan Mayorga (né en 1965) dans “Le garçon du dernier rang”, Lukas Bärfuss (né en 1971) et Pauline Sales (née en 1969) portent leur regard sur la famille, thème chéri du théâtre psychologique ou du théâtre de boulevard.
Après “Les névroses sexuelles de nos parents”, où une jeune fille handicapée mentale voyait sa libido libérée après qu’on lui ait ôtée sa camisole chimique, Bärfuss intégre, dans sa troisième pièce éditée par l’Arche, cette technique scientifique récente, la recherche de paternité par analyse de l’ADN. Suite à la question d’un ami, Frantzeck, Pierre n’est plus du tout sûr d’être le père de l’enfant qu’il adore et qu’ il a eu avec Agnès. Il se décide à passer “Le Test”. Agnès, sa femme, ne voulait pas garder l’enfant, elle n’en connait pas le père. Frantzeck, ancien alcoolique, amoureux d’Agnés, cherche à se faire adopter par Simon Coré, père de Pierre. Simon est en pleine campagne électorale, rêve de devenir maire.
Il est saisi d’un doute: Hélène, sa femme, ne l’aurait-t-elle pas trompée avec Gruber, son ennemi politique de toujours ? Une ronde de scènes alertement menées qui se conclut par un coup de révolver et les cris d’un nourrisson dans le noir.
Paul Jésus (60 ans) le personnage principal de Family art (pour une actrice et quatre comédiens) est gynécologue obstétricien, chef de service dans un hôpital. Personnage idéal pour glisser des confidences (“C’est très proche des travaux
manuels la pose d’un stérilet”
), présenter rapidement les différents moyens de contraception ou rappeller l’histoire du docteur Fernand Lacaze accoucheur à la clinique des métallurgistes Les Bluets tenue par la CGT qui ramena, d’un voyage en Union soviétique, la méthode ASD (accouchement sans douleur) inspirée des travaux de conditionnement de Pavlov sur la douleur et l’émotion négative créées par la peur. Paul a été abandonné par sa mère à la naissance. Il n’a pas d’enfant et vit avec Maxime. Maxime lui aussi ne connait pas sa mère, Suzanne une artiste plasticienne célèbre internationalement qui est partie après sa naissance. Elle avait décidé de garder cet enfant, non désiré par Jean son compagnon, pour le “donner” à Paul, l’ami de Jean. Maxime travaille maintenant comme clown dans le service pédiatrie de l’hôpital et tombe amoureux d’Alice, bientôt enceinte... Cette pièce, où passé et présent, vivants et les morts n’arrêtent pas de dialoguer a été créée le 3 mars 2009 dans le collège Cévenol de Chambon-sur-Lignon par la Comédie de Saint-Étienne.

VINAVER Michel L’Ordinaire, pièce en sept morceaux, Babel, 2009
Pour son entrée au répertoire de la Comédie-Française, dans une mise en scène de son auteur (né en 1927), la pièce est rééditée, dans l’une des rares collections de théâtre de poche. (On y trouve déjà à un prix très abordable le théâtre d’Olivier Py, de Grumberg, Ribes...) Écrite en 1981, L’Ordinaire a comme point de départ un fait divers mythique, entré dans la mémoire collective. Lors du crash en 1972 de leur avion dans la cordillère des Andes, les membres d’une équipe de rugby avaient été contraints, pour survivre, d’enfreindre un tabou majeur et de pratiquer le cannibalisme. Vinaver, ex-chef d’entreprise, remplace ces passagers sportifs par les dirigeants d’une multinationale américaine. Une substitution qui prend un relief particulier en un moment où le capitalisme gravement accidenté semble n’en plus finir de mourir. Le théâtre de Vinaver est-il vraiment “un monde sans procès” comme l’écrivait Barthes? Comment s’organiser après la catastrophe?

BENACQUISTA Tonino Saga, Gallimard, 2009
Le Manteau d’Arlequin, prestigieuse collection des années 70, n’est pas morte, elle publie à nouveau une pièce de Benacquista. La précédente, “Contrat”, mettait face-à-face un gangster et son psychanalyste. Cette fois, le dramaturge, surtout connu pour ses romans policiers et scénarios de films, s’intéresse au monde de la télévision. Comment parler de la télévision au théâtre? Guy Foissy (L’événement, 1965), Bruno Castan (Neige écarlate, 1994) ou Philippe Dorin (Les Enchaînés, 2008) ont traité diversement du sujet. Un peu comme Vinaver (L’Émission de télévision, 1988), Benacquista choisit d’aborder le fonctionnement du “petit écran” de l’intérieur, en amont, du côté production.
Le directeur des programmes d’une chaîne privée convoque quatre auteurs au chômage pour concocter un feuilleton bouche-trou, pas vraiment destiné à être vu, qui passera à 9h du matin, entre les émissions pour gosses et le télé-achat. Chaque épisode durera 52’, avec 3 coupures publicitaires. Il n’y aura que des acteurs inconnus et aucune scène d’extérieur, pas plus de trois décors, huit personnages dans tout le feuilleton, jamais plus de trois par épisode. Le directeur promet aux quatre scénaristes une liberté totale et leur offre un salaire de misère: ils se mettent tout de suite au travail...
La pièce Saga nécessite quatre comédiens et une actrice. Elle est une adaptation du roman Saga publié par l’auteur en 1998. Le sujet lui avait été inspiré par le paysage télévisuel des années 80. La Cinq, chaîne de Robert Hersant et Silvio Berlusconi, était alors à ses débuts.Elle avait dû produire dans l’urgence le sit-com “Voisin, voisine” pour respecter les quotas de création française imposés par le cahier des charges.

EMBOUTEILLAGE CARAÏBE L'oiseau de passage, Le mendiant, Le marchand de romances, Homobilus de Frantz Succab - La goutte d'eau, Le roi du Béton, Estoutt de Bernard Lagier - Molokôy d'Ina Césaire - Noces d'essence de José Jernidier - Un père et manque d'Arielle Bloesch -Parce que … de Laura Leclerc - Dans le ventre de Gilda Gonfier, Lansman, 2009
SUCCAB Frantz Conte à mourir debout, Lansman, 2009
CONDÉ Maryse La faute à la vie, Lansman, 2009
Édités en Belgique par Lansman, ces trois livres ont aussi comme point commun d’avoir été écrits par des auteurs guadeloupéens et martiniquais (d’origine ou d’adoption). À l’heure où la Guadeloupe sort d’un mouvement social historique (quarante-quatre jours de grève générale où l’île a fonctionné au ralenti à l’allure d’une tortue molokôy) une occasion de partir à la rencontre des successeurs d’ Aimé Césaire et de Daniel Boukman.
Maryse Condé (née en 1937) romancière et dramaturge, membre du Comité pour la mémoire de l’esclavage choisit pour sa dernière pièce le cadre d’ un appartement parisien. Deux femmes, en fin de vie, amies, évoquent leurs souvenirs, et l’homme qu’elles ont aimé et partagé comme amant. L’une est blanche fille d’émigrés siciliens, l’autre est noire née en Guadeloupe, au Gosier, avant que le petit village ne devienne une marina avec yachts, villas avec piscine, hôtels de luxe.
À travers l’histoire des derniers moments du grand “tambouyé” Roberval, c’est la fin d’un monde traditionnel qui est au centre du “conte à mourir debout” de Frantz Succab. Éditorialiste pour la revue satirique Motphrasé, parolier du groupe musical Milflè, mêlant français et kréyol, l’auteur pratique un théâtre de l’esquive, l’ art du “masko”: entre l’annonce de la mort prochaine de Roberval ( “d’une prostatation mal encayée et d’un rhum sec accidentel” ) et sa disparition vers les Grands-Fonds le jour de la venue du président de la République française, il est impossible de savoir si “l’ agrégé en mentir”, grand tripoteur de bougresses, est toujours vivant ou déjà mort.
On retrouve Succab dans l’ouvrage collectif Embouteillage Caraïbe. Depuis Weekend de Jean-Luc Godard (1967) et son mémorable travelling ( “le plus grand de l’histoire du cinémahttp://www.youtube.com/watch?v=wC9d9rxjuhg), l’embouteillage n’a cessé d’être un sujet d’inspiration (L’autoroute du Sud de Cortazar, Le grand embouteillage de Comencini, 1979). À la suite du recueil Embouteillage, trente-six scènes automobiles (Théâtrales, 2002) sept auteurs se livrent à l’exercice, alternant monologues et dialogues. Parmi les scènes courtes de ce “théâtre de route”, on notera celle de Gilda Gonfier qui imagine dans un véhicule à l’arrêt la rencontre d’un patron et d’un syndicaliste, ou de “l’art de négocier dans une voiture l’application d’une convention collective”.
http://svr1.cg971.fr/lameca/LamecaInfo/repertoire/repertoire_theatre/sommaire.htm

BARRETEAU Virginie La Centrale - La Geste des endormis, Quartett, 2009
Trois enfants partis jouer, dans la forêt se retrouvent la nuit venue, bientôt perdus. En suivant une rivière gelée, La Cornue, ils arrivent dans un village. Derrière la fenêtre d’une maison, une bougie veille. Ils frappent à la porte, un boucher leur ouvre... Un conte d’hiver d’une grande musicalité avec en arrière plan la légende de Saint Nicolas. Une partition pour trois voix (Johane, ÉRIC, Isan) identifiables grâce à la typographie.
“ Ah! Qu’est-ce qui?QUOI?Là! Oh!Il neige!
Comme c’est beau!
CA ME CHATOUILLE! QU’AI-JE?
Il neige! IL NEIGE! Oh, neige, viens! ”
La Geste des endormis est précédée de La Centrale ( pièce pour 4 ou 5 comédiens).Le salaire du père, parti travailler à l’étranger sur un chantier, n’ayant pas été versé sur le compte bancaire, l’électricité, non payée, est coupée dans l’appartement où vit sa famille. Une bougie allumée déclenche un incendie dans lequel périssent sa femme et sa fille.
http://www.quartett.fr

WASTIAUX François Entre les murs, théâtre-récit, Théâtre ouvert, 2009
Après la version cinématographique de Laurent Cantet, Palme d’or au festival de Cannes 2008, le roman de François Bégaudeau paru chez Gallimard en 2006 est adapté au théâtre. De la machine à café et de la photocopieuse de la salle des professeurs au tableau de la classe, de réunion d’orientation en conseil de discipline, la vie durant une année scolaire d’un professeur principal enseignant de français, de ses élèves et collègues, d’un collège difficile de la Seine-Saint-Denis (93). “Comment prendre en charge les élèves en grande difficulté? Comment lutter efficacement contre les violences et les incivilités? Quelles relations établir entre les membres de la communauté éducative -en particulier entre parents et professeurs et entre professeurs et élèves? Comment améliorer la qualité de vie des élèves à l’École? (...) Faut-il redéfinir les métiers de l’École?”

CHOUAKI Aziz Les Coloniaux, Mille et une nuits, 2009
À travers la fable du berger kabyle Mohand Hakli qui conseilla Pétain pour la reconquête du fort de Douaumont, l’auteur revient sur le parcours de ces 450 000 tirailleurs et zouaves étrangers, dont 149 522 Algériens, mobilisés durant la Première guerre mondiale. Ceux qui échappèrent au massacre revinrent au bled transformés. “Très préoccupant. Je réalise soudain que je suis un occupé. Parti défendre son occupant contre un occupant qui l’occupe.” Résultat d’une commande officielle pour le 90ème anniversaire de la bataille de Verdun, ce récit fut lu pour la première fois par Fellag en 2006 sur le site même des combats. “Le travail du scribe consiste à gérer le pathos, l’enthousiasme, l’apothéose, le panthéon. Celui de l’huissier, à évacuer l’émotion, la morale, à s’en tenir aux faits. Le poète a été exclu par Socrate de sa Cité idéale, car la poésie falsifierait l’histoire. Le poète n’est ni un scribe ni un huissier."

LE LIVRE DES ÉCRIVAINS ASSOCIÉS DU THÉÂTRE DE SUISSE,
Bernard Campiche, 2008. - 647p - 14, 60€.
À l’aube du 3ème millénaire, les créations d’auteurs de théâtre vivants ne représentaient que 8 % en France contre 32% en Allemagne. Pour rendre une visibilité aux dramaturges vivants, pour qu’ils soient plus souvent à l’affiche, naît, à Paris en 2000, l’association des Écrivains Associés du Théâtre. Le premier président en sera Michel Azama. Née en 2004 sur le modèle des EAT français, l’association EAT de Suisse regroupe la quasi-totalité des auteurs dramatiques actifs en Suisse romande, 44 auteurs qui ont tous été joués sur scène et/ou publiés. On y retrouve Bernard Liegme, Michel Viala, Jacques Probst, Yves Laplace, René Zahnd; Agota Kristof ou Antoine Jaccoud en sont absents. Classés alphabétiquement d’Ahmed Belbachir à Dominique Ziegler, les 44 auteurs répondent d’abord individuellement à une question: pourquoi écrit-il du théâtre.
Puis chacun présente une bio-bibliographie et un extrait d’une pièce récente. Un livre-manifeste, un guide, une anthologie, pour découvrir les écritures théâtrales actuelles de la Suisse francophone.
"http://www.eat-ch.org

MEYER-PLANTUREUX Chantal Le théâtre monte au Front, Complexe, 2008.
-416p, ill.
La guerre de 14-18 ne fut pas, semble-t-il, un frein au développement au théâtre, elle lui ouvrit même de nouveaux débouchés. Durant le conflit, plus de 4 500 spectacles seront montés à Paris. Sur le front, de février 1916 à septembre 1919, le théâtre aux armées, organisé par l’administrateur de la Comédie-Française donnera à lui seul 1 172 représentations devant 1,5 million de spectateurs. Huit historiennes se sont réunies pour analyser un répertoire théâtral, strictement contrôlé par la censure, où l’art recule au profit du divertissement, de la propagande, où le soldat devient le héros principal des pièces. Elles analysent l’influence de la guerre sur l’écriture des auteurs juifs, la place des femmes, l’image de l’embusqué, du “boche” sur scène. Le désir de “Plus jamais ça!” donnera naissance dans les années 20 à un théâtre ouvrier pacifiste. Ces essais sont prolongés par une anthologie mêlant témoignages d’époque (Antoine, Dullin, Gémier, Abram) et des extraits de pièces à redécouvrir comme Les Chaînes de Georges Bourdon ou Liluli de Romain Rolland.

SAUREL Renée Le Théâtre face au pouvoir, chroniques d’une relation orageuse, L’Harmattan, 2008. -295p.
SAUREL Renée 33 ans de chroniques dramatiques (1952-1984) publiées dans Les Temps modernes, cédérom
Après un passage aux Lettres françaises où elle assure une chronique consacrée à la radio et à la télévision, Renée Saurel entre aux Temps modernes en 1952.
Pendant trente-trois ans, jusqu’en 1984, elle va être responsable de la critique théâtrale et produire, année après année, une oeuvre critique monumentale, incontournable . Elle est vraiment “l’un des témoins les plus exhaustifs de la vie du théâtre français des années cinquante à quatre-vingt”. En lisant ses chroniques, on réalise que rares sont les spectacles importants, les auteurs nouveaux qui ont échappé au regard de cette femme passionnée et sans concession. Autour de 1965, elle commence à écrire aussi sur l’aspect institutionnel de la vie théâtrale. Robert Abirached a réuni, sous le titre “Le Théâtre face au pouvoir”, un choix de vingt-trois articles, publiés à partir de cette date, sur les jeunes compagnies, la décentralisation, le théâtre et l’école, la tentation du populisme, le ministère Druon, Roger Blin...Toujours présente pour la défense d’une création libre, on la voit prendre position en faveur de la Comédie de Saint-Étienne menacée, soutenir Alain Rais et la compagnie des Spectacles de l’Étang de Berre en danger ou, inversement, dénoncer Robert Hossein “hypermarché de la sous-culture”.
Pour permettre l’accés à l’intégralité des articles de Renée Sauret écrits dans Les Temps modernes, soit 2200 pages, Simone et Bernard Pissarro ont réalisé un cédérom comprenant aussi un index des noms de personnes, oeuvres, spectacles, théâtres cités ainsi que sa pièce inédite La Fève noire. Il est disponible sur commande à l’adresse suivante: sipissarro@free.fr

CRICHTON SMITH Iain Le lectorium, ou le souffroir du Picte existentialiste, traduit de l'anglais (Écosse) par Jean Berton, Publications de l'Université de Saint-Étienne, 2008.
Meurdoc, célibataire athée, cultivateur cultivé des Hautes-Terres d’Écosse, vit chez sa mère. Grand lecteur de Beckett et de Kafka, hanté par Kant, il perd à 39 ans l’envie de manier la pioche et la bêche et décide de ne plus sortir de son lit... Une des rares oeuvres traduites en français de cet auteur écossais (1928-1998) écrivant tour à tour en gaélique (sa première langue) ou en anglais, connu surtout pour sa poésie, ses nouvelles et ses romans.

BURGER Benoît - SIABAS Christian - JACQUEMOND Marc A.B.C. de la sonorisation, Régie culturelle régionale Provence-Alpes-Côte d'Azur, 2008. -139p, ill.
Parmi les multiples cas de figure, ce guide propose des exemples pratiques d’installation pour la sonorisation d’une conférence, d’une pièce de théâtre, de rues, d’une chorale, d’un quartet de jazz, d’un concert de musiques actuelles ou de musique classique. Après un rappel des différents principes physiques concernant le son, sa perception et sa mesure, il présente la technologie nécessaire en matière de captation et de diffusion ainsi que la législation en matière de niveaux sonores. Il se termine par une bibliographie et un glossaire. Éviter la “ronflette”: “bruit parasite de fréquence basse, ressemblant à un ronflement et provoqué par l’alimentation secteur ou une masse défectueuse”.

CORMANN Enzo Je m’appelle et autres textes, Minuit, 2008
Dans Je m’appelle (solo), Cormann esquisse un mémorial des victimes d’un siècle de guerre (économique) mondiale. Dans Donnant, donnant (quatuor) il montre les effets remarquables d’une loi du marché: “Tu me donnes ta montre, je te donne l’heure”. Dans Le dit de l’impétrance (duo), retour et variations sur une séance de casting. Dans Communication obligatoire (solo), des consignes visant à une rationalisation de la prose du monde sont données à un échantillon de mille personnes représentatives de l’espèce. Quatre textes courts, écrits entre 1999 et 2005, quatre propositions fortes pour la scène.

DEVOLDER Eddy - PERRIN Renaud Woyzeck, d’après l’oeuvre de Georg Büchner, éditions Quiquandquoi et Les Oiseaux de Passage, 2008
Mis en musique pour l’opéra par Alban Berg, porté au cinéma par Werner Herzog avec Klaus Kinski dans le rôle titre, le chef d’oeuvre inachevé de Büchner, fait ici l’objet d’une nouvelle adaptation: le récit de la marche vers la folie et le crime de Frantz Woyzeck, victime de l’armée et cobaye de la science, est porté par une voix unique, celle de Christian, l’enfant né de son union avec Marie. Cette nouvelle édition est proposée avec vingt-quatre remarquables linogravures de Renaud Perrin.

DEVOLDER Eddy - PERRIN Renaud Woyzeck

PAPIN Nathalie La morsure de l’âne, L’école des loisirs, 2008
LACHAUD Denis Moi et ma bouche, Actes Sud-Papiers/Heyoka jeunesse,2008
DILASSER Marie Crash Test, L’ACT MEM, 2008
Presque simultanément viennent de paraître trois pièces dont les personnages principaux sont entre la vie et la mort.
Avec La morsure de l’âne, écrite en 2004, Nathalie Papin ajoute une nouvelle pièce à son oeuvre originale. Depuis notamment Debout, qui raconte l’histoire d’un petit garçon dans un cimetière, on connait sa capacité à décrire des expériences limite dans une langue précise, réduite à un minimum de mots. D’entrée, avec la barque, le passage du fleuve, les rapides, le lecteur est amené à suivre Paco - la cinquantaine, victime d’un anévrisme - sur l’autre rive. Il y rencontre différentes créatures de l’au-delà: Noïké tout d’abord, une femme pressée, avec qui il expérimente la tentation de mourir ( “laissez-vous mourir c’est délicieux “), un âne qui le porte et qui le mord (tant qu’il y a de la douleur, il y a de la vie), la Mort (“c’est honteux l’image de moi qu’on donne dans la littérature”) Renée, une vieille dame de 80 ans elle aussi dans le coma (elle s’est jetée dans la mer depuis une falaise bretonne), Zoé, une petite fille pas encore née qui veut que Paco vive car elle l’a choisi comme père. Dans cette zone grise, des membres de la famille de Paco sont présents: Uriel, son petit garçon qui accepte qu’il meure, sa mère qui déjà pense à choisir pour le bientôt mort des chaussures et des gants, sa fille aînée enceinte qui lui tient la main. Paco va pouvoir aussi dialoguer avec son Corps, un corps enfin accepté, qui parle et qui décide de ramener Paco à une nouvelle vie, alors que tout semblait cliniquement fini.
C’est ce dialogue avec le corps, qui est au centre de la pièce de Denis Lachaud, Moi et ma bouche. Pauline, les yeux clos, est enfermée à l’intérieur d’elle-même. Dans sa tête, c’est la grande discussion: son Moi parle à sa Bouche, son Cerveau dialogue avec l’Oeil gauche, l’Oreille droite. Mais c’est très difficile. Impossible d’ouvrir un oeil, les paupières ne répondent plus. Le Cerveau et ses organes des sens lui disent qu’elle est dans une chambre d’hôpital. Elle entend très loin les voix de son père, de sa mère qui lui parlent. Des souvenirs affleurent: images de vacances en famille à la neige, de l’accident en scooter. L’adolescente endormie, dans le coma, va en sortir, grâce à Océane, sa copine, qui lui fait écouter le dernier disque de Madonna, sa chanteuse préférée.
Brit’Butum, ouvrière dans une entreprise de poulets et Arsène Droch, le manager de l’usine où elle travaille sont eux aussi à l’hôpital, suite à un choc frontal entre leurs deux véhicules: une Fiat Panda et un quatre-quatre, aggravé par la percussion d’ un camion dix-neuf tonnes. Emmêlés, éclatés, les deux protagonistes de Crash Test de Marie Dilasser, poursuivent dans leur coma, le dialogue social.
Vous êtes habillée de fringues fabriquées par des gens encore plus exploités que vous, vous vous nourrissez de viandes emballées, déballées puis remballées provenant d’animaux malades du foie et de fruits et légumes cancérigènes, vous habitez dans un clapiert insalubre que vous devrez peut-être quitter pour des cartons le jour de votre départ en retraite (si vous tenez jusques là) et il ne vous reste même pas de quoi mettre du gazole dans votre véhicule pour aller vous promener les jours de repos! Pourquoi avez-vous tant d’obéissance?” déclare Arsène. Brit’ lui confie: “Jai rêvé plusieurs fois qu’elle sautait l’usine.”
Symptomes révélateurs peut être d’un “corps social” en crise, qui hésite, qui ne sait plus s’il veut être ou ne pas être, en attente de réveil, d’une autre vie, ces trois pièces sont sûrement des défis lancés aux metteurs en scène.
Éditée par l’ACT MEM, Crash Test est l’une pièces lauréates en 2008 des Journées de Lyon des auteurs de théâtre.
http://www.lactmem.com/theatre.html
http://www.auteursdetheatre.org/

COMME UN PAPIER TUE-MOUCHES DANS UNE MAISON DE VACANCES FERMÉE 1 ÉCRIRE EN MAI 68 /Armand Gatti, La Parole errante, 2008 - 294p, ill.
Dans le cadre de l’exposition "Comme du papier tue-mouches dans une maison de vacances fermée" (jusqu’au 14 février 2009, à La Maison de l’Arbre, Montreuil) la Parole errante publie "Écrire en mai 68-Armand Gatti", un livre-catalogue qui témoigne de la présence théâtrale débordante de Gatti en 1968 dans trois domaines: le livre, la scène, la rue.
La même année en France, trois de ses pièces sont successivement publiées au Seuil: Les 13 soleils de la rue Saint-Blaise créée le 15 mars par Guy Rétoré au Théâtre de l’Est parisien; La naissance, mise en scène le 18 septembre par Roland Monod à la Biennale de Venise puis reprise à partir du 8 novembre au Théâtre Romain-Rolland de Villejuif; La Passion du général Franco, qui doit être mise en scène par Gatti au TNP mais qui est interdite le 18 décembre suite aux pressions du gouvernement espagnol. À partir d’avril-mai, Gatti a commencé à écrire des pièces d’intervention - comme Les Hauts Plateaux qui parait dans le journal Action-pièces qui seront réunies plus tard sous le titre de Petit manuel de guérilla urbaine. La mort du lycéen Gilles Tautin, noyé à Flins en juin sera au centre de Interdit aux plus de 30 ans, pièce qu’il écrit l’année suivante. Recueil de documents parfois inédits, "Écrire en mai 68" propose des témoignages de collaborateurs proches de l’auteur, un décryptage partiel des cours qu’il avait donnés en 1970 à l’Université libre de Berlin, en particulier sur le théâtre de rue, un entretien avec Denis Bablet paru en 1971 dans la revue “Travail théâtral”, ainsi que le texte de "L'interdiction de La Passion du général Franco", impromptu que Gatti écrit en réaction à la censure de "La Passion du général Franco".
68 est une année charnière où Gatti commence à expérimenter d’autres méthodes d’écriture: écrire la pièce en temps réel pendant les répétitions, faire des témoins de l’écriture les acteurs du spectacle, écrire dans la rue, inventer le théâtre hors du théâtre. Elles vont guider son travail jusqu’aujourd’hui.
http://www.armand-gatti.org

MARIN Lou Albert Camus et les libertaires (1948-1960), Égrégores, 2008. -361p, ill.
Au moment où paraissent dans La Pléiade les deux derniers volumes des oeuvres complètes du prix Nobel de littérature 1957, Lou Marin réunit des articles de Camus publiés dans la presse libertaire. Si une sensibilité libertaire de Camus peut être détectée dans sa première pièce Révolte dans les Asturies interdite par le maire d’Alger et dans ses articles publiés dans Le Soir républicain, son premier article pour la presse libertaire parait dans Défense de l’homme en 1949. D’autres suivront dans Liberté, Contre-Courant, Témoins, Révolution prolétarienne. Au fil des pages, on découvre des personnalités libertaires avec qui il eut des liens Rirette Maîtrejean qui lui transmet en 1940 la tradition libertaire française, Louis Lecoin avec qui il collabore à la rédaction du statut d’ objecteur de conscience, Jean-Paul Samson, Pierre Monatte. On peut suivre dans Le Monde libertaire les débats provoqués par la publication de “L’homme révolté”. On constate aussi le soutien qu’apporte la mouvance libertaire à Camus en de multiples circonstances: lors de sa querelle l’opposant à Sartre, lors de ses prises de position en faveur de Messali Hadj, des révoltés de Berlin, de Budapest ... Lou Marin invite à tenir compte de cet engagement politique qui, pour elle, éclaire des pièces comme Les Justes ou L’État de siège. « Je crois que la violence est inévitable (…) Je dis seulement qu’il faut refuser toute légitimation de la violence » écrivait Camus.

LEMAIRE Dominique Saltimbanques, roman, L’Harmattan, 2008. -254p.
Miroir de la société, le théâtre est aussi un miroir pour lui-même. Les dramaturges, les premiers ont aimé faire du théâtre avec le théâtre, mettre en scène des comédiens au travail, donner à voir les coulisses de l’illusion ou les acteurs hors scène, sans masque, dans la vie. Matière à tableaux pour de nombreux peintres, le comédien a été aussi un sujet d’inspiration pour de nombreux romanciers :
Théophile Gautier avec “Capitaine Fracasse” ou Klaus Mann avec “Mephisto", en écrivant le roman d’un acteur, ont dressé le portrait d’une époque. Avec Saltimbanques, Dominique Lemaire fait le portrait d’un milieu qu’il connait bien, celui des “comédiens des rues, jongleurs à deux balles, posticheurs, camelots, bonimenteurs et autres stars du trottoir, mes chers collègues...”. Pendant sept mois, il suit le parcours de Vladimir, 40 ans, artiste de rue, intermittent du spectacle, habitant Montreuil. Cette tranche de vie, qui s’étend entre deux ouvertures de droits Assedic, est bornée par deux grues ”symboliques”. La première est installée dans un parc d’une ville de la banlieue parisienne. C’est le dernier week-end de septembre: après défilé aux flambeaux et parade, Vladimir est l’un des 20 tambourinaires-jouets à être suspendus à 33 mètres de haut pour
constituer un mobile humain. La deuxième grue est installée à Nantes. C’est le printemps. Dans le cadre d’une journée sur le passé esclavagiste de la ville, devant trois mille personnes, Vladimir saute à l’élastique dans le vide, apothéose d’ un spectacle provoquant, “L’Ascenseur social est en panne”. Entre ces deux actes que tout oppose, Vladimir aura fait le grand écart, il aura été engagé par Karagiosis, “un émule de Dario Fo et de Lenny Bruce” qui taille en pièces la religion, le travail, “les phynances”, “un Diogène moderne qui montre ce que le monde refuse de voir”. Entre-temps, il aura fait aussi une tournée dans les écoles avec son spectacle solo “L’Homme-oiseau” et rencontré peut être l’amour avec Lauren, une journaliste qui prépare pour la télévision un reportage sur les arts de la rue. “Je ne suis pas encore au RMI. J’ai récupéré les alloc’s la semaine dernière. Il me reste deux cent quarante-trois jours pour être insolent.

O’CONNOR Bridget Fanions, traduit de l’anglais par Serge Valletti, Les Solitaires intempestifs, 2008
Jean-Jérôme Calesbrani et Patrick Masse sont deux minables, responsables de la sécurité et du nettoyage sur la plus polluée des plages de tout le Grand Littoral. Ces deux épaves, “maîtres nageurs sauveteurs”, ont déjà trois noyés à leur actif qu’ils ont planqués sous le sable. Entre le ramassage des chiens crevés et le tir au fusil sur les mouettes, ils rêvent d’un poste qui s’est libéré à la plage des Bains d'Argent, célèbre pour ses “dunes entières de tétons et de fesses à perte de vue”. Pour obtenir leur mutation, Jean-Jé a entamé une relation sexuelle avec Marie- Thérèse: cette vieille fille n’est pas très excitante mais elle est la soeur de Christian Duchâtenais, leur chef et inspecteur dont l’avis sera décisif... Une comédie noire, pour trois hommes et une femme, adaptée par Serge Valletti.

LODGE David L’atelier d’écriture, traduit de l’anglais par Béatrice Hammer et Armand Éloi, Rivages, 2008. -121p.
Dans une ferme du XVIIème de la campagne anglaise, 14 étudiants (femmes au foyer, salariés, retraités, chômeurs) s’apprêtent à suivre un stage d’écriture créative. Pendant cinq jours, ils vont pouvoir profiter des conseils de deux célèbres romanciers, en rencontrer un troisième qui doit venir faire une lecture. Cette comédie pour 3 hommes, deux femmes et un répondeur est suivie d’extraits du journal tenu par l’auteur en 1990, lors de la création de la pièce au Repertory Theater de Birmingham. Romancier, critique, longtemps professeur de littérature à l'université, David Lodge est notamment connu pour son essai L'art de la fiction, où il présente un panorama assez complet des théories du récit.

CÜCENOGLU Tuncer Avalanche suivie de Impasse, traduit du turc par Valérie Gay-Aksoy, L’Espace d’un instant, 2008. -158p.
Quelque part... une communauté vit repliée sur elle-même, cernée par les montagnes enneigées, sous la menace d’une avalanche qui risque de la détruire. Ce microcosme, inaccessible neuf mois par an, vit dans la peur et le silence absolu: paroles mesurées, pas de cris, pas de bruits, pas d’animaux, pas d’enfants. Une vie feutrée, étouffée. Durant les trois mois d’été, les jeunes, partis travailler à l’étranger reviennent au pays visiter leurs parents et les ravitailler. Dans une maison, la jeune bru, 18 ans, enceinte, qui ne devrait accoucher que dans un mois ressent ce matin les premières contractions... Ses cris et ceux du nouveau-né prématuré risquent de provoquer la catastrophe. Avalanche est suivie d’Impasse, autre pièce de Tuncer Cücenoglu: une jeune femme, aidée par sa soeur attire dans un piège le policier qui sept ans auparavant l’avait torturée et avait tué son mari. Pour échapper à la censure turque, le dramaturge a déplacé l’action en Grèce en 1967, après le coup d’État de Papadopoulos.

VOSSIER Frédéric Porneia, Tombeau pour Georges P., précédé de Mannekijn,
Quartett, 2008. -109p.
Suite à une proposition d’écriture autour du fait divers, Vossier revient sur une affaire qui faillit déstabiliser Georges P., P comme Pompidou. Le 27 septembre 1968 était découvert dans un bois, près de Paris, le cadavre de Stephan Markovic, ancien garde du corps, doublure lumière d’Alain Delon. La correspondance privée du yougoslave semble impliquer Delon et le truand corse François Marcantoni. Markovic vivait dans l’un des appartements de la star, fréquentait les fêtes organisées par la vedette à Saint-Tropez. Les Pompidou ont aussi une maison à Saint-Tropez. La presse à scandales fait des rapprochements, des photos truquées circulent, une campagne de salissage commence contre le Premier ministre, qui envisage “un destin national”. Devenu en 1969 président de la République, il demandera la démission du SDECE de Jean-Charles Marchiani - qu’il tient responsable de la manipulation, et fera passer la loi du 17 juillet 1970 sur la protection de la vie privée.”Ces journaux sentent mauvais” dit la femme à son mari très occupé à les relire. Hors champ, Harry, l’enfant du couple, né le jour où la police découvrait le cadavre de Markovic, joue avec des poupées, fait “caca” dans sa culotte.”Mais qui a tué Stephan Markovic?

RETALLACK John Risque, traduit de l'anglais par Isabelle Famchon, Les Solitaires intempestifs, 2008
Face à une société hyper sécurisée où les instructions aux baby-sitters et autres informations sur les risques liés aux aires de jeux pour les enfants en temps de paix s'allongent de jour en jour, cinq adolescents lancent défi au vide et à l'ennui qui guettent. Pour se sentir exister, chacun d'entre eux, à sa manière, expérimente ses limites: Paul le joueur va-t-il réussir à voler l'or du géant, comme dans "Jack et le haricot magique"? Martin, prisonnier volontaire dans sa chambre, en franchira t-il le seuil ? Michèle va-t-elle surmonter sa peur et réussir à traverser à la course les six voies de l'autoroute ?...

CELESTINI Ascanio Fabbrica, traduit de l’italien par Kathleen Dulac, Théâtrales, 2008. -42p.
Sous la forme d’une lettre adressée à sa mère, le narrateur raconte l’histoire de la “fabbrica”, cette usine où il est engagé le 17 mars 1949, où il se mutile volontairement deux doigts pour être sûr de conserver son emploi. Histoire d’une aciérie depuis sa fondation au début du siècle jusqu’à son démantèlement dans les années 80. ”En trois ans, entre1948 et 1950, il y a eu soixante-deux morts dans les affrontements avec la police. Pendant ces années-là, jusqu’en 1960, on calcule que sur cent vingt-huit préfets et deux cent quarante et un vice-préfets, seulement deux n’ont pas fait partie des institutions fascistes...” De cette courte pièce émergent le personnage extrardinaire d’Assunta et les trois figures ouvrières prénommées Fausto. “Le mort porte le vivant, mais le vivant doit porter en avant la vie du mort et doit en porter le nom.” Après Antonio Tarantino, Fausto Paravidino, Ugo Chiti, tardivement traduits en français, voici un nouvel auteur italien (né en 1972) à découvrir.

KNUTZON Line Bientôt viendra le temps, traduit du danois par Catherine Lise Dubost, Espaces 34, 2008. -98p.
CAMUS Renaud Théâtre ce soir, Éditions Jean Paul Bayol, 2008. -92p.
Le théâtre de boulevard est toujours vivant. Pour preuve, ces deux pièces ironiques qui veulent en dynamiter les conventions. Pour sa première pièce, Renaud Camus, fait successivement pénétrer dans un décor unique inspiré d’Au théâtre ce soir, les cinq membres d’une famille bourgeoise (le père, la bonne, la mère, le fils, la fille): cinq voix, cinq discours fermés sur eux-mêmes auxquels s’ajoutent ceux d’Ahmed et d’un Christ, grognon, grommeleur. De son côté, Lise Knutzon (née en en 1965) réunit pour un repas d’anniversaire à la maison deux couples (la trentaine) de vieux amis, sous le regard d’une jeune et insolente domestique récemment engagée. Pour déconstruire les figures imposées du genre (portes qui claquent, placard où se cache l’ex-mari, tentative de meurtre, adultère) l’arme principale de l’auteure danoise consiste à dérégler le temps: “(...) une fois où je voulais désherber une rangée de fraisiers. Je vais chercher un râteau dans la baraque à outils, et quand je ressors, cinq années ont passé.” Quant à Pauv’Chérie, la fille de Rebekka et Hilbert, elle a vingt-cinq ans de plus que ses parents.

CAHIERS DE THÉÂTRE JEU n°127, Solo, 2008. -208p.
La revue québécoise consacre une grande partie de son dernier numéro au monologue. On peut y découvrir des études sur Robert Lepage, Pol Pelletier, Larry Tremblay, Jasmine Dubé, Fabrice Melquiot, le témoignage de Marcel Pomerlo... À noter aussi un compte-rendu sur "Figures du monologue théâtral ou Seul en scène", livre publié en 2007 sous la direction d'Irène Roy par les éditions Nota Bene.
http://www.revuejeu.org

FARR David L'inspecteur des Nations Unies - The UN inspector, édition bilingue, traduit de l'anglais et préfacé par Nathalie Rivière de Carles, Presses Universitaires du Mirail, 2008. -211p.
170 ans après sa création (1836), le Révizor de Gogol est retransposé aujourd’hui dans une ancienne république soviétique. La rumeur de l’arrivée d’un inspecteur des Nations Unies déclenche la panique au plus haut niveau d’un appareil d’État corrompu, qui a détourné les fonds prêtés par le FMI, privatisé le secteur public, vendu les actifs à des sociétés étrangères. Pour parer à l’urgence, le président de “ ce pays modèle du capitalisme libéral de l’ère post-soviétique”, élu démocratiquement suite à trois élections truquées, fait vider les prisons surpeuplées de tous les détenus sauf des politiques dont il équipe les cellules de canapés Ikéa et d’halogènes, fait arracher la langue à une journaliste trop bavarde, prépare pour accueillir le visiteur une limousine avec des vitres particulièrement fumées pour qu’il ne voit pas les rues crasseuses...

PELLET Christophe La Conférence, L’Arche, 2008
De retour en France après un long séjour à Berlin, Thomas Blanguernon est engagé pour faire une conférence dans une entreprise culturelle. Erreur fatale. Il est aussitôt repris par une immense colère contre “cet État français, empoissé d’esprit français qui nous annihile, détruit toute élévation, prend aux pauvres pour donner aux riches, bâillonne les êtres sensés pour promouvoir les imbéciles”. Les entreprises culturelles françaises, “lieux de perdition pour l’esprit et la beauté” sont complices, l’air des théâtres est vicié. “La France s’enferme, elle bloque ses frontières aux autres, elle expulse, elle s’enferme avec son seul esprit français, on manque d’air, on étouffe”.

LANOYE Tom Mefisto for ever, adapté d’après Klaus Mann, traduit du néerlandais par Alain Van Crugten, Tonneelhuis, 2008.-118p.
OLYSLAEGERS Jeroen Wolfskers, d’après trois scénarios de Yuri Arabov et Alexandre Sokourov, traduit du néerlandais par Monique Nagielkopf, Tonneelhuis, 2008.-85p.
LANOYE Tom Atropa. La vengeance de la paix, traduit du néerlandais par Alain Van Crugten, Tonneelhuis, 2008.-88p.
JANS Erwin Triptyque du pouvoir, perspective et réflexions, traduit du néerlandais par Alain Van Crugten, Tonneelhuis, 2008.-72p.
Le Tonneelhuis, théâtre municipal d’Anvers, édite trois pièces, mises en scène récemment par son directeur Guy Cassiers. Mephisto for ever revient sur le parcours de l’acteur et metteur en scène allemand Gustav Gründgens: exemple de l’ artiste opportuniste, il collabora avec les nazis et poursuivit une carrière de haut niveau après leur chute, jusqu’à sa mort en 1963; sa vie avait fait l’objet en 1979 d’un spectacle d’ Ariane Mnouchkine. Wolfskers prend pour sujet trois dictateurs du XXème siècle: Lénine, Hitler, Hiro-Hito. Atropa, librement adapté d’Euripide, Eschyle, Malaparte, George W. Bush revient sur la mère de toute les guerres, la guerre de Troie. Ces trois spectacles, réunis par Cassiers sous le titre de Triptyque du pouvoir sont analysés par Erwin Jans, dramaturge au Tonneelhuis.

HEILMANN Éric - LÉGER Françoise - SAGOT-DUVAUROUX Jean-Louis - SCHNEBELIN Bruno Ilotopie, les utopies à l’épreuve de l’art,
L’ Entretemps, 2008. -223p, ill.
Effet de la prise de conscience tardive de leur valeur, signe de reconnaissance de leur importance, les arts de la rue deviennent objet d’études et de mémoire. Après les livres déjà parus par ailleurs sur des compagnies emblématiques comme Royal de Luxe ou Cacahuette, voici une monographie qui retrace le parcours d’ une autre compagnie française “canal historique”, Ilotopie. Installée depuis 1980 en Camargue, à Port-Saint-Louis, cette compagnie tout terrain s’est structurée au fil du temps en construisant en 1991 un lieu de fabrique, le Citron jaune, labellisé Centre national des arts de la rue en 2005. Célèbre pour ses détournements urbains (La vie en abribus) et ses interventions dans les quartiers populaires (Palace Loyer Modéré, La Tour), elle a su développer des pièces de répertoire intemporelles comme ”Les gens de couleurs” qui voyagent à travers le monde. L’un de ses principaux apports est d’avoir renoué avec le goût hérité de Rome pour le théâtre sur l’eau. Ce théâtre nautique (L’île aux topies), fait d’images oniriques (Narcisse guette) est doublement à l’épreuve aujourd’hui : tiraillé d’un côté par l’économie, il succombe à la tentation des plans d’eau spectaculaires (Fous de Bassin à Versailles); travaillé par une conscience écologique d’autre part, il cherche une voie dans le Land Act et les “Envies Rhônements”.


CARNETS DU GRAND T Petit traité de scénographie, représentation de lieu / lieu de représentation, textes choisis par Marcel Freydefont, n°10, Joca Seria, 2008. - 152p, ill.
D’Aristote à Peduzzi, de Sabattini à Kokkos, en passant par Jarry, Delarozière ou Franck Bauchard, cette anthologie regroupe 76 extraits de textes de scénographes, architectes, auteurs de théâtre ou metteurs en scène. Un panorama historique et une carte esthétique de la scénographie, l’un des trois piliers, avec la dramaturgie et la régie, de l’art du théâtre.


SERRES Karin Le petit bonhomme vert (et le rouge!), Éditions du Bonhomme vert, 2008. -44p, ill.
Depuis la publication en 2005 de Bout de bois de Jean Cagnard, les éditions du Bonhomme vert, basées dans le Gard, poursuivent la construction d’un catalogue de pièces de théâtre illustrées pour les enfants. Ce nouveau texte, le dixième de la collection, est accessible dès le cours préparatoire. Il a pour protagonistes deux icônes, familières des passages piétonniers: un petit bonhomme rouge et un petit bonhomme vert.

CAHIERS DE LA MAISON JEAN VILAR 1968, Vilar, Béjart, le bazar, n°105, juillet 2008. -64p, ill
La Maison Jean Vilar revient sur le festival (troublé) d’Avignon 1968. Numéro téléchargeable.
http://maisonjeanvilar.org/public/pdf/cahiers_mjv_105.pdf

MELQUIOT Fabrice Faire l’amour est une maladie mentale qui gaspille du temps et de l’énergie, L’Arche, 2008. -93p
Alban Legal: Je n’avais jamais remarqué cette chaise. /Bernard Faucher: Elle est là depuis des mois. C’est la nouvelle mesure gouvernementale. Tu en as forcément entendu parler. Il faut, mon cher petit garçon, dans tous les foyers, une chaise pour la Police.(...) /Alban Legal: Comme l’assiette du pauvre?/ Bernard Faucher:L’assiette du pauvre c’est dangereux. Tu ouvres ta maison à n’importe qui, toi? Avec cette chaise on ne risque rien. Et puis, c’est la promesse d’un bon moment. D’un moment à l’autre. Elle viendra s’asseoir.” Une pièce policière pour trois acteurs.

TREMBLAY Larry Abraham Lincoln va au théâtre, Lansman, 2008.-70p.
Le 14 avril 1865, un vendredi saint, Abraham Lincoln était révolvérisé par un acteur, John Wilkes Booth, alors qu’il assistait à une représentation de Our American Cousin de Tom Taylor, dans une loge du Ford’s Theatre de Washington. Cet assassinat politique est le point de départ du nouveau projet d’un grand metteur en scène. Pour ce spectacle, il engage un couple célèbre de deux acteurs d’une série télévisée à qui il confie les rôles de Laurel et Hardy. Son propos: danser la mort de l’Amérique puisque aujourd’hui “L’Amérique n’est plus un pays, un continent mais une façon de faire le mal.L’Amérique n’a plus rien à voir avec ce goût de la liberté et de l’avenir.C’est la mort portant le masque de la bêtise.” Dédiée à Romain Gary, cette pièce à trois personnages est une mise en abyme pour six acteurs.

PROBLÈMES ÉCONOMIQUES Dossier: Les industries culturelles face aux défis de la gratuité, La Documentation Française, n°2939, 2008. p1-32.
Dans un système économique où profit et concurrence sont la règle, l’offre de biens ou de services culturels gratuits est paradoxale et déclenche une controverse. La Documentation française éclaire le débat en réunissant différents articles publiés sur le sujet depuis 2004 par Jacques Attali, Denis Olivennes, Daniel Cohen, Pierre-Noël Giraud, Bernard Benhamou, Françoise Benhamou.

CONTAMIN Laurent Tobie, Lansman, 2008. - 45p
“C’est du théâtre pour la jeunesse ce que vous allez lire ou voir. <Pour la jeunesse>, ça veut dire...on va parler de ce qui intéresse la jeunesse de chacun, à savoir l’amour.”Raphaël, comme l’ ange, est l’un des protagonistes de cette histoire biblique qui se passe hier/aujourd’hui en Assyrie / Irak à Bagdad/Babylone. La ville est occupée par les soldats d’ une armée étrangère qui laissent les cadavres des “terroristes” pourrir dans les rues. Sur fond de guerre, histoire d’amour entre Tobie et Sara, une jeune vierge dont le démon Asmodée est amoureux: jaloux, il a fait mourir tous ses amants.( 7 personnages: deux hommes, deux femmes, deux adolescents, un ange Et un chien, un oiseau, un poisson)

FRÉCHETTE Carole La Petite Pièce en haut de l’escalier, Actes Sud-Papiers, 2008. - 74p.
Dans une maison immense, il y a quelque part, un escalier dérobé. En haut de cet escalier, il y a un couloir étroit. Au bout du couloir, il y a une porte close. Devant la porte close, il y a une jeune femme, Grâce, qui regarde, comme hypnotisée.” Auteure canadienne, Carole Fréchette, avec un art consommé du suspens, renouvelle le conte de la Barbe-Bleue et lui donne une dimension mythique en faisant de l’héroïne, pure Grâce, une figure inversée de Pandore.(6 personnages: 4 femmes, deux hommes)

GUÉNOUN Denis Tout ce que je dis, Les Cahiers de l’Égaré, avril 2008. - 59p.
Théâtre dans le théâtre, dialogue entre deux hommes. L’un, le premier acteur est comédien. Il a pour prénom Frédéric, comme l’acteur et metteur en scène à qui est dédiée cette pièce “Tout ce que je dis, tout ce que je dirai, m’est soufflé par un autre qui l’a écrit.” dit-il. Le second acteur est auteur, l’auteur de la pièce. Il a pour prénom Denis. Ce qui pourrait n’être qu’une variation pirandellienne sur le thème de la rencontre de l’auteur et de son personnage va à la source du désir d’écrire (Écrire par amour, ici homosexuel ): recherche impossible d’un dialogue avec l’ autre, miroir et objet de la pensée.”Qu’appelles-tu penser? Des mots de l’âme pour elle-même sur les choses qu’elle regarde. Une âme qui pense ne fait rien d’autre que dialoguer d’elle à elle; affirmer et aussi dire non. Qu’en penses-tu?

AGENCE RÉGIONALE DU LIVRE PACA Comment rémunérer les auteurs?,
Agence Régionale du Livre Paca, 2008. -16p.
Un petit guide actualisé, pratique pour répondre à une difficulté fréquemment rencontrée par les diffuseurs: comment rémunérer les auteurs tant dans le respect de leurs droits que dans celui des réglementations sociales et fiscales?
Téléchargeable.
http://livre-paca.org/docs/pratique_pj/0058a2cf1b3370655592209b2e5bb727.pdf

ÉTUDES THÉÂTRALES
Théâtre populaire: actualité d’une utopie, n°40,
Centres d’études théâtrales, Université catholique de Louvain, 2008. - 144 p.
Ce numéro de la revue belge revient notamment sur des figures historiques (Émile Copfermann, Armand Gatti, André Benedetto), dresse un état des lieux aujourd’hui du théâtre-forum d’Augusto Boal en France, questionne les pratiques théâtrales en milieu scolaire. Au risque du grand écart, il revisite les notions de théâtre populaire et d’identité nationale, à travers les spectacles de Fellag, Nasser Djemaï, Mohamed Rouabhi, Djamel Debbouze ou... Dany Boon . “Le théâtre populaire est toujours un défi”.

LE TOUZE Guillaume Les ogres pupuces, Heyoka jeunesse-Actes Sud-Papiers, 2008.
Guidés par quatre scientifiques, des enfants partent à la rencontre de petites créatures venus de l’ère glaciaire, découvertes par hasard au fin fond de la Sibérie en 1999. Une imposture exotique dans la grande tradition des entresorts forains.

BUSQUETS I FABREGAS Jaume Bonnes pratiques paysagères, lignes directrices, traduction française de Marie Bihan, Generalitat de Catalunya2007.
- 207p, ill et DVD.
GANDOLFI Cinzia - CIABATTI  Sandro Catalogue des bonnes pratiques pour le paysage, édition trilingue espagnol-français-italien, Regione Toscana, 2007.
-204p, ill et DVD
COLLECTIF Observatoire virtuel du paysage méditerranéen, édition trilingue espagnol- français-italien, Junta de Andalucia, 2007.
-123p, ill et DVD
Conséquence  de la Convention européenne du paysage adoptée par le Conseil de l'Europe à Florence en 2OOO, destinée à préserver et à valoriser la variété des paysages, ces trois ouvrages abondamment illustrés sont l'exemple d'une collaboration transfrontalière regroupant treize régions de quatre pays européens: les communautés autonomes d'Andalousie, de Murcie, de Valence et de Catalogne (Espagne), la région Provence-Alpes-Côte d'Azur (France), les régions de Toscane, Ombrie, Latium, Piémont,Émilie-Romagne, Lombardie, Basilicate (Italie) et la préfecture de Magnésie (Grèce).
Le premier livre, après avoir distingué paysages agraires, industriels, infrastructures routières, définit la notion de "paysage culturel". Le deuxième ouvrage, lié au Prix méditerranéen du Paysage 2007, revient sur des actions exemplaires menées dans les treize régions, dans quatre catégories (projets, réalisations, expériences de sensibilisation, communication). La troisième publication et le DVD qui l'accompagne permettent de visualiser 467 paysages retenus par l'Observatoire virtuel du paysage méditerranéen.
http://www.paysmed.net


ZAMBON Catherine Kaïna-Marseille, D’une seule voix /Actes Sud Junior, 2007
Port autonome de Marseille, hangars, conteneurs. Face à la mer, Mamata, 16 ans, fait un rituel pour sa grand-mère Kaïna qui l’a élevée en Algérie et qui a organisé son exil vers la France.. “Aujourd’hui est un jour premier. Aujourd’hui est un jour où je prends la parole”. Monologue, récit de vie dans une nouvelle collection théâtrale pour les adolescents.

ABDOURAZZOQOV Barzou Huit monologues de femmes, traduit du russe (Tadjikistan) par Stéphane A. Dudoignon, Zulma, 2007
À la frontière de l’Afghanistan et de l’Ouzbékistan, entre mosquées et ruines de l’ère soviétique, huit femmes tadjiks disent leur histoire (différente pour chacune d’elles) en toute liberté.

ANDRÉAS-SALOMÉ Lou La cape magique, traduit de l'allemand par Stéphane Michaud, Des femmes-Antoinette Fouque, 2007
Minuit. Une petite fille seule dans la maison ouvre la porte de sa chambre à un nain. Il prétend posséder une cape magique qui rend invisible. C'est aussi un sculpteur génial qui va séduire toute la famille... Une pièce rare, écrite en 1923 par celle qui fut l'amie de Nietzsche, Rilke et Freud.

ASCHER François / APEL-MULLER Mireille La rue est à nous... tous - The street belongs to all of us! Au DIable Vauvert, 2007. - 308p, ill.
On y travaille, on y habite, on s' y cultive le corps et l'esprit, on y circule, on y consomme. Et dans toutes les villes , les mêmes questions: à quoi et à qui servent les rues? À qui appartiennent-elles? Qui décide, contrôle, surveille? Comment concilIer tous les modes de déplacements, les besoins des passants, des habitants, des commerçants? Comment les rendre fluides, conviviales? Jusqu'où la publicité, le commerce, la liberté d'expression, l'art peuvent-ils s'y déployer, s'en emparer?

AUBERT Marion
Les Aventures de Nathalie Nicole Nicole, Actes Sud-Papiers, 2007
"Il était une fois trois petits enfants. Ils allaient. Irresponsables. Ils dormaient dans le nid des couleuvres. Ils allaient. Riant sous la lune. Éternels. Poursuivis par une horde de mamans terribles. Ils cherchaient une source d’eau potable. Poursuivis par les siècles des siècles. Nous allons semer la douleur éternelle dans les haltesgarderies, nous. Claironnaient-ils.Ils venaient. Les fils de Satan. Ils volaient les hosties dans les chapelles. Ils allaient dans la tendresse du matin. Avides d’être aimés..." En 102 épisodes-fragments, le récit fluide des aventures de trois copains Nathalie Nicole Nicole, Cléo et Michel, accompagnés par un choeur : L’enfant pratique, le Petit enfant fou, la Maman, la Maîtresse, Papa, le Maire de Poujols, le Diable ...

BAUER Wolfgang Sigismond Pfnacht, traduit de l'allemand par Pascal Rinck, Publications des Universités de Rouen et du Havre, 2007
Une ville tranquille de Carinthie. Au petit matin, un Américain est retrouvé mort dans une ruelle. Contre l'évidencel'étranger a été tué accidentellement par la chute d'une tuile- deux policiers municipaux concluent à un meurtre, dans l'espoir d'une promotion. Aussitôt le dentiste, l'instituteur, le maire du village viennent spontanément dénoncer Sigismond Pfnacht, un poète jouisseur qui les ruine au poker...Une pièce anti-policière par un dramaturge autrichien à découvrir, digne compatriote de Peter Turrini et Thomas Bernhard.

CAHIERS DE LA MAISON JEAN VILAR, n°102, 2007
Le Bulletin d’information de la Maison Jean Vilar depuis un an change de présentation. Le numéro de ce trimestre, 60ème anniversaire oblige, revient sur la naissance du festival d’Avignon, en septembre 1947 : témoignages, clichés d’époque, articles de presse, portraits, issus des archives municipales de la ville ou du fonds de la BNF (Bibliothèque nationale de France).
http://www.maisonjeanvilar.org

ÉMOND Paul Le sourire du diable, Lansman, 2007
« Les artistes sont les mécaniciens de l’âme. Nous devons prendre soin des âmes de ce pays, les conduire dans le bon sens. » C’est par la flatterie envers l’intellectuel qui le fustige, que le président Lafaro tente de légitimer la dictature qu’il prépare. Bruno Carabas, romancier célèbre, tombera dans le piège, victime de sa vanité.

GOSSE Olivier Le temps qu’il nous reste, Christophe Chomant, 2007
Dans une cité, Blaise peint la beauté nue de Myriam sur la toile ; expérience révélatrice pour la jeune femme, mais inacceptable pour son grand frère. « On signe des chèques pour imprimer de beaux livres pleins de paroles d’habitants cassés par la vie. Pour quoi faire ? Pour donner bonne conscience à ceux qui ne font rien pour nous. Ça leur reviendra toujours moins cher que de nous donner du boulot. »

GREIG David L’architecte, traduit de l’anglais (Écosse) et mis en scène par Matthew Jocelyn, L’Avant-scène, n°1222, 2007
Tout s’écroule autour de cet architecte : son couple, sa famille, le « grand ensemble » dont il avait fait les plans . Une vision en soufflet des idéologies sur lesquelles la société s’est élevée. Comme si en voulant toucher le ciel, on se préparait inexorablement à voir un jour ou l’autre le sol se rapprocher de trop près. À noter dans la même livraison, un dossier sur le théâtre écossais.

JAUBERTIE Stéphane Jojo au bord du monde, Théâtrales, 2007
Jonas-Joachim Tabanas dit Jojo est un solo boy urbain. Dans une rue déserte, il traîne avec son ballon de foot crevé pendant que ses parents sont à l’autre bout du monde au soleil, ayant gagné un voyage dans un village de vacances. Surgissent deux fées déglinguées, Anita et sa vieille mère en fauteuil roulant qui lui demandent par erreur de faire un voeu. Pour remercier Anita qui a un rancart, de la raquette de badmington qu’elle a fait apparaître, le garçon lui propose de garder la mémé qui perd la boule. Anita dit qu’elle viendra la rechercher à minuit mais Jilette disparaît. Parti à sa recherche, Jojo va croiser les créatures qui hantent la clinique de désintoxication du Dr Demal Kejdi puis le bar de son frère Demal Kejfé: parmi elles, Blanche-Neige, et Batman, un fan de Léo Férré et de Ni Dieu ni Maître. Quatrième pièce de Jaubertie.

LE FLOC’H Maud - CHAUDOIR Philippe
Mission Repérage(s), un élu, un artiste, L’Entretemps, 2007
Démarrage en beauté d’une nouvelle collection consacrée aux arts de la rue chez L'Entretemps avec la parution notamment de ces étonnants compte-rendus de repérage : dans 13 villes de France , un élu et un artiste se sont rencontrés pour dire la ville, le temps d’une journée, le temps d’une traversée. Retranscription de ces échanges sans commande, sans projet, qui ont produit de l’intelligence, de l’imaginaire. À poursuivre.

LEVEY Sylvain Pour rire pour passer le temps, Théâtrales, 2007
Drôle de façon de passer le temps, et surtout de rire, entre quatre personnages identifiables par un simple numéro 1, 2, 3 et 4 (deux bourreaux, un complice et leur victime). Les scènes de tortures, d’humiliation, se succèdent jusqu’à virer à l’absurde. C’est bien l’absurdité humaine, l’assouvissement de pulsions primaires propres à l’être humain, et son désir de domination et de supériorité sur son congénère, qui se dégage de ce texte.

MALONE Philippe Morituri, Quartett, 2007
Un homme politique, dont l’opinion publique raillait jusqu’alors son discours, réussit à accéder au pouvoir en s’imposant petit à petit dans la sphère médiatique. Les urnes lui offriront la victoire, et le peuple est désormais sous le joug de son tyran faute de n’avoir su résister à temps à ce dictateur. “Ainsi ce fut simple. Toute la haine semée au cours de ma carrière, je n’eus plus qu’à la moissonner, les terreaux sont fertiles lorsque la pourriture croît....Il s’agit de courage, oui Monsieur, celui d’avaler haut ce que d’autres chient bas ! ”

MüLLER Heiner La Déplacée, traduit de l’allemand par Irène Bonnaud et Maurice
Tazman, Minuit, 2007
Créée le 30 septembre 1961 dans un faubourg de Berlin-Est et interdite le soir même, cette pièce marque un tournant dans la carrière de l’auteur, qui préférera par la suite les allégories énigmatiques au réalisme direct.

NORÉN Lars Le 20 novembre, traduit du suédois par Katrin Ahlgren, L’Arche, 2007
Comme à Erfurt en 2002,à Colombine en 1999. Un jeune de 18 ans se prépare en 2006 à Emstetten (Westphallie) à tuer le plus grand nombre d’élèves et de professeurs de son lycée. Dans 1 heure 12. “C’est peut être trop demander d’être heureux ça suffit peut-être de pas perdre son boulot de ne pas être obligé de mendier pour avoir un toit c’est peut-être assez pour les autres pas assez pour moi si j’arrive pas à trouver un sens à la vie je vais trouver un sens à la mort mais je partirai pas seul je vais fondre comme un vautour sur ces cadavres qui ont détruit ma vie et en griffer autant que je peux”.

PASCAL Julia La Traversée de Jérusalem, traduit de l'anglais par Alain Franck, L'Amandier, 2007
Dans la rue, un petit Palestinien (12 ans) se fait tuer par un soldat israélien alors qu’il lance des pierres avec son copain Sharif (16 ans). À l’hôpital, Yusuf venu identifier son frère Sharif mort dans l’explosion d’un bus retrouve Yael dont le mari est mort dans le même attentat. Entre les deux scènes, 24 heures. Une journée ordinaire en mars 2002, au cours de la 2ème intifada, à Jérusalem, à travers la vie croisée de trois communautés : une famille juive vient fêter dans le restaurant chrétien tenu par Sammy et son employé musulman, le 30 ème anniversaire de Yael, qui voulait un enfant.

ZINN Howard En suivant Emma, traduit de l'anglais par Julie David, Agone, 2007
Pièce historique sur Emma Goldman, anarchiste et féministe américaine (1869-1940). Par l'auteur de Karl Marx, le retour.

BENOît (BSK) Pelléas et Mélisande, journal des répétitions, Compagnie Hi Han, 2006
Sous forme de bande dessinée, Benoît, dit BSK, dresse un journal des répétitions d’une pièce de Maurice Maeterlinck “Pelléas et Mélisande” jouée par la compagnie Hi-Han.
Le point de vue d’un domaine artistique sur un autre… qui s’arrête avant «la première ».

BIOT Paul
Théâtre-Action de 1996 à 2006, théâtre(s) en résistance(s), Cerisier, 2006
Le Théâtre-Action, né au début des années 70, regroupe des compagnies théâtrales s’inscrivant toutes dans une même logique et un objectif commun de démocratisation culturelle. Cet ouvrage rend compte de cette démarche pour un spectacle vivant et ouvert sur la société.

CHECCHETTO Rémi Là où l’âme se déchire un peu mais pas toute, Inventaire–Invention, 2006
C’est à cet endroit précis, cette fissure camouflée sous la rigidité de notre boîte crânienne, où l’auteur semble s’être engouffré pour en extirper ce texte d’une très grande sensibilité, et d’une justesse que seule une expérience personnelle aux cotés de sans-papiers pouvait exprimer.

JACCOUD Antoine En attendant la grippe aviaire et autres pièces : Je suis le mari de Lolo Ferrari... - Les Chiens - Une journée à regarder les choses - Après - Le Voyage en Suisse - On liquide - Monologue de la Brouette - En attendant la grippe
aviaire, Bernard Campiche, 2006
Le théâtre francophone suisse existe. Après René Zahnd (Mokhor et autres pièces, 2005), Jacques Probst (Théâtre I, 2005 ; Théâtre 2,Théâtre 3, 2006 ), Anne Cuneo (Rencontres avec Hamlet, 2005) l’éditeur Bernard Campiche, basé à Orbe, nous fait découvrir dans sa collection Répertoire plusieurs pièces d’Antoine Jaccoud.

LOBO ANTUNES Antonio Le cul de Judas, adaptation de François Duval, traduit du portugais par Pierre Léglise-Costa, Christian Bourgois, 2006
Le “cul de Judas” ou l’histoire d’une guerre improbable, pourtant menée par l’armée coloniale portugaise au début des années 1970 en Angola. Le long et profond monologue d’un ancien médecin aux armées, qui n’en a pas fini pour autant avec les blessures humaines.

LOMBARDOT Roger
Fa’a’amu, l’enfant adoptif, Les Cahiers de l’Égaré, 2006
Une mère révèle à son fils les circonstances de son adoption. Cela commence par un long cri du coeur, avant de s’achever par le franchissement d’une ligne imaginaire. Entre les deux, un chemin d’angoisses, d’incertitudes, de remises en questions : un accord de guitare peut tout effacer.

MORATAL Marcel Est-ce que répandre du bleu c’est faire la mer : ou l’histoire d’un bleu à l’âme, L’Harmattan, 2006
Des raviolis pour réconcilier tout le monde. Une couleur, le bleu, mais pas un bleu de parade, pour peindre les rêves et masquer les idéologies du Pouvoir Central. Un bleu pour lutter contre l’amnésie. Un discours étrange, celui de Sam, à moins que ce soit celui de ceux qui tiennent absolument à ce qu’il prenne ses cachets ?

NEYTON André
L’Affaire de la Belle Cadière, Rencontres – CDO, 2006
À l'automne 1731, s'ouvrait devant le Parlement d'Aix-en-Provence un procès en sorcellerie entre une jeune femme, Catherine Cadière, et son amant le Père jésuite Jean-Baptiste Girard, recteur du séminaire royal de Toulon, poursuivi pour « inceste spirituel, avortement et enchantement ».

PAPIN Nathalie
Qui rira verra, L’école des loisirs, 2006
Art, mène dans son atelier d’étranges expériences pour construire un monde parfait. Il a enlevé et séquestre quatre enfants à qui il demande de lui raconter des histoires parce que nul ne peut vivre sans histoires, de ne jamais rire car il est convaincu que le rire est dangereux.

RAUCH Marie-Ange
De la cigale à la fourmi : Histoire du mouvement syndical des artistes interprètes français (1840-1960), L’Amandier, 2006
Au moment où le statut des intermittents du spectacle est menacé, cet essai revient sur la lutte menée par l’Union des artistes pour l’obtention de droits fondamentaux à la création artistique en France, mais aussi pour en préserver la diversité.

 
 
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